LA MONNAIE

Plan du cours

Section 1 : La nature de la monnaie

    I. Généalogie de la monnaie
        A. La monnaie à travers l’Histoire
        B. Les composantes actuelles de la monnaie
            1. La monnaie fiduciaire
( monnaie "matérialisée" )
                a) la monnaie divisionnaire
                b) la monnaie-papier
            2. La monnaie scripturale
( monnaie "dématérialisée" )

    II. Les différentes théories sur la nature de la monnaie
        A. L’analyse " instrumentale " de la monnaie, par ses fonctions
            1. La monnaie est une unité de compte : divisibilité
            2. La monnaie comme réserve de valeur : durabilité
            3. La monnaie comme moyen de paiement : acceptabilité
        B. L'approche "essentielle" de la monnaie

Section 2 : Le système bancaire

    I. La masse monétaire et ses contreparties
        A. La masse monétaire
        B. Les contreparties de la masse monétaire

    II . La spécificité bancaire dans l’intermédiation financière
        A. Intermédiation financière : cas général
        B. La singularité bancaire
: l'opération monétaire
                    1. La séquence néoclassique ( NC ) : la "duplication monétaire"
            2. La séquence keynésienne :la " création " monétaire: 

    III. Des acteurs primordiaux du système bancaire : Banque de France et Trésor Public
        A. La Banque de France
        B. Le Trésor Public

Section 3 : Le financement de l’économie

    I. Les enjeux de la monnaie
        A. Les controverses doctrinales récurrentes
            1. Le débat initial et les théories sous-jacentes
            2. Les controverses actuelles
        B. Faits et méfaits en économie : une histoire de théories
            1. Définitions
            2. les analyses de l'inflation

    II. Le financement des activités
        A. Le financement intermédié ( indirect ): la priorité Keynésienne
        B. Le financement désintermédié ( direct ) : la priorité néoclassique ( NC )
            1. Le rôle central de l’épargne
            2. Les marchés de capitaux : des marchés compartimentés
                a. Le marché monétaire
                b. Le marché financier
   
                   c. Les marchés dérivés

    III. Les politiques monétaires

 

Cours

 

Section 1 : La nature de la monnaie

     I. Généalogie de la monnaie

        A. La monnaie à travers l’Histoire

    Selon la thèse la plus répandue, la tendance générale de l’évolution monétaire, est celle d’une dématérialisation croissante de la monnaie, selon une perspective historique linéaire. Ladite monnaie serait l'instrument fondamental, de l'amélioration des échanges depuis le troc originel. 
La numismatique ( science qui traite de la description et de l’histoire de la monnaie), n'a de cesse de mettre en relief, l’extrême diversité des formes de monnaie.

Epoque

inventions

norme monétaire

base de la valeur

préhistoire

lingots de métal    
antiquité   marchandises ( sel, huile, blé, bronze, électrum... ) emploi sous forme de marchandises

VIIème av J.C

pièces de métal ( avec poinçon ) en Lydie ( Asie mineure )    

14°siècle

billet à ordre (chèque )    

1656

Billets
 (banque de Suède)
   
jusqu’à la
fin 18°s
  métaux précieux
( or et argent )
rareté des métaux
19°siècle   monnaie-papier ( billets de banque convertibles et virements ) confiance et convertibilité
20°siècle   billets inconvertibles , virements, et cartes magnétiques confiance dématérialisation
21°siècle   cartes magnétiques ?  

 

    La monnaie a longtemps été palpable et sa valeur intrinsèquement identifiable. Mais, au fil du temps, cette relation intime s'est distendue avec la création de supports, pour lesquels la notion de valeur sui generis, apparaît comme un lointain référentiel ( ex : une carte magnétique ).
A ce titre, l’effet de commerce ( titre de créance fondé sur une opération commerciale et transmissible par endossement ) créé, en raison de paiements différés, a marqué les débuts de la tendance à la dématérialisation de la monnaie, s’y substituant fort bien.

    Cette thèse largement diffusée se voit, de nos jours, largement remise en cause, dans la mesure où le recours à une monnaie dématérialisée n'est pas l'apanage des sociétés dites "développées". De même, il n'est pas rare de voir lesdites sociétés, recourir à des formes premières de monnaie.

        B. Les composantes actuelles de la monnaie

            1. La monnaie fiduciaire ( monnaie "matérialisée" )

    La dénomination de monnaie "fiduciaire" ( fiducia = confiance . Cf Dictionnaire Robert) vient du fait que sa valeur faciale, est supérieure à sa valeur "réelle", mesurée par le poids de papier ou de métal ( pièces et billets n'ont aucune valeur sui generis ) : c’est une monnaie à laquelle on fait confiance, de fait.

                a) la monnaie divisionnaire

    Elle est composée de pièces émises par le Trésor Public et frappée à l’Hôtel de la Monnaie ( en particulier à Pessac ). On parle de monnaie "divisionnaire", car elle permet de régler des achats de faible valeur.

                b) la monnaie-papier

    Elle est composée essentiellement de billets émis par la Banque de France.

            2. La monnaie scripturale ( monnaie dématérialisée )

    La monnaie scripturale ( de scriptura = écriture en latin.  Cf Dictionnaire Robert ) est constituée par l’ensemble des inscriptions dans les comptes en banque. Elle circule d'un compte à un autre par simple jeu d'écritures, manuelles ou électroniques, grâce à des supports tel que le chèque, le virement, la carte magnétique.
Cette forme de monnaie est majoritaire dans les pays développés bien que difficilement cernable ; les dépôts dans les banques étant soit à vue ( c’est à dire immédiatement utilisables ) soit à terme ( bloqués pendant une certaine durée).

    La monnaie est donc a priori, un actif accepté par des agents sur un espace donné, en règlement d'une transaction ou extinction d'une dette.  
De ce point de vue, l'or, symbole de la monnaie marchandise, parce qu'il n'incarne aucunement une dette ( d'où sa qualité de valeur refuge, en période de crise majeure ), peut être considéré comme le parangon de l'actif réel.

Mais s'en tenir à ce type de définition est réducteur, dans la mesure où la monnaie est aussi un passif : toute créance d'un individu sur un autre, est fondamentalement une dette de ce dernier vis à vis du premier. 
Par voie de conséquence, la monnaie incarne une dette, en particulier des agents bancaires envers les agents non bancaires : la notion de confiance est donc primordiale ( cf. notion de liquidité ).

    II. Les différentes théories sur la nature de la monnaie

        A. L’analyse " instrumentale " de la monnaie, par ses fonctions

    Cette approche considère que la monnaie est une marchandise comme les autres, dont l'intérêt se résume à ses fonctions ou qualités ; ainsi les supports monétaires ont en commun :

- leur divisibilité, ils permettent de mesurer petites et grandes valeurs
- leur validité, leur valeur intrinsèque est universellement reconnue
- leur durabilité, leur durée de vie dans le temps garantit la conservation du pouvoir d’achat.

            1. La monnaie est une unité de compte : divisibilité

    Le problème fondamental posé par l’échange, consiste en une détermination la plus équitable ( égalitaire ? ) possible, de la valeur des produits échangés. Si l'on se réfère à la valeur d’échange ( exit donc, la valeur d'usage subjective ), constatée objectivement, qui représente la valeur moyenne accordée dans un espace donné à un bien donné, et que l’on considère que le prix déterminé par les offres et les demandes en donne une bonne indication ; il reste à trouver l’étalon qui permettra de déterminer la valeur, in fine.


La loi de WALRAS ( la problématique du " n-1 " )

    Chaque marchandise en l’absence d’unité de compte, verra sa valeur définie, en fonction de la quantité de chacune des autres marchandises , qu’elle peut représenter : on est ici en présence de valeurs relatives.

Soient 6 biens, A, B, C, D, E F : en régime de troc, le nombre de combinaisons possibles est de 15 :
A/B A/C A/D A/E A/F
B/C B/D B/E B/F
C/D C/E C/F
D/E D/F
E/F

    En l’absence d’étalon commun à tous les biens, l’évaluation de toutes les valeurs relatives, constitue un obstacle insurmontable ; ainsi dans le cas où l’on a 40 biens à évaluer, cela signifie 780 combinaisons possibles ; analyse combinatoire : la formule générique est pour n biens
C²n = n!/(n-2)!*2! = n ( n-1 ) / 2

Si on choisit, dans l’exemple précédent, un des biens comme étalon en lui donnant la valeur 1, le nombre de combinaisons est moins important, il est de n-1 ( 40-1 = 39 ) soit 39 prix.


            2. La monnaie comme réserve de valeur : durabilité

    Selon J-M KEYNES : " L'importance de la monnaie découle essentiellement du fait qu'elle constitue un lien entre le présent et l'avenir ". 
Ainsi, elle peut être conservée afin de reporter dans le temps des achats. 

Le risque, est toutefois, de voir la valeur de la monnaie décroître pour cause d'inflation ( baisse du pouvoir d'achat ).

            3. La monnaie comme moyen de paiement : acceptabilité

    On peut se demander si la fonction de moyen de paiement n'est pas subordonnée à la confirmation des fonctions précédentes. Par exemple, la notion de réserve de valeur est fondamentale pour celui qui reçoit le paiement en monnaie, et s’apprête à conserver ladite monnaie ; elle conditionne de fait, l’acceptation de la monnaie comme moyen de paiement.
La monnaie est acceptée d'autant plus facilement qu'elle bénéficie d'une certaine aura cumulative, que lui confère son acceptation : le processus de la "dollarisation" ( P. SALAMA ) en est un exemple flagrant.

Le choix d’une forme de monnaie particulière résulte donc, de la cristallisation ( autour d’un métal ou d’une monnaie nationale ) de ces trois fonctions indissociables précitées : le dollar en est aujourd'hui l'exemple le plus abouti.

        B. L'approche "essentielle" de la monnaie

Les origines de la monnaie selon la vision "morphogénètique" ( Cf.J-P DUPUY ).

    René GIRARD, philosophe français vivant aux Etats-Unis et enseignant à l'Université Stanford de Californie, a donné une explication universelle du fonctionnement social. Selon lui, le problème fondamental auquel est confronté tout ordre social, est la canalisation de la violence, née du désir mimétique d'appropriation. En effet, l'homme est la créature qui, au delà, des besoins essentiels, désire intensément mais sans savoir vraiment quoi : il en vient donc à désirer ce que l'autre désire ( cette théorie s'oppose à la vision freudienne, où l'homme désire sa mère par exemple ).
Dès lors, la rareté inhérente à la condition humaine fait que chaque bien est susceptible d'être convoité par plusieurs individus, qui risquent d'utiliser la violence pour en exclure les autres ( "rivalité mimétique" ).
Par l'avènement du sacré, les sociétés vont parvenir à transformer ce mimétisme d'appropriation en mimétisme d'exclusion. Le stratagème consiste à trouver une victime émissaire, sur laquelle sera focalisée la violence, ainsi exclue du champ social quotidien. Cette logique expliquerait des pratiques extrêmement diverses, telles que les rites sacrificiels ( Abraham sacrifiant un bélier pour épargner son fils, ou les assertions du grand prêtre CAÏPHE dans la passion du Christ "il vaut mieux qu'un seul homme meure pour le peuple et que la nation ne périsse pas toute entière" Evangile selon St Jean ), ou la prohibition de l'inceste ( cf. C. LEVI-STRAUSS : cours de seconde ).
Dans ce dernier cas, pour extirper la violence née du désir de possession des femmes, de l'intérieur du cercle familial, on détourne vers l'extérieur les stratégies de conquête. Ce qui aboutit à la consécration de la logique de l'échange : un groupe donne un homme, l'autre une femme. Ce type d'unions matrimoniales étaient dans les sociétés traditionnelles, l'occasion de circulation de richesses matérielles et symboliques ( volonté sous-jacente de création de réseaux d'influence avec en contrepoids, l'ambiguité de la réciprocité, dans l'échange et le don ).

Par extension, dans la société marchande, l'échange d'objets permet de dévier le désir mimétique de l'individu en tant que tel, vers la possession desdits objets, grâce à une monnaie qui polarise toute violence. Pour M. AGLIETTA et A. ORLEAN, dans La violence de la monnaie, la généralisation des rapports monétaires dans le cadre du système capitaliste serait emprunt de cette même dynamique. 

La monnaie serait donc in fine, première : elle fonde l'économie marchande ( les échanges de troc ne seraient donc pas préalables aux échanges monétaires ). Elle est aussi plus généralement, la base du social, dans la mesure où elle est ce bien, qui incarne, une violence polarisée exclue, mais aussi cet équivalent général, qui permettra de représenter institutionnellement le social ( mesure de la valeur comme nombre ).

 

La monnaie comme convention

    La monnaie apparaît en définitive, comme une convention, dans la mesure où elle constitue un accord de fait pour l’ensemble des individus, qui se révèle, à l’usage, d’une grande commodité pratique, mais dont il est impossible d’expliquer de façon expérimentale ( donc scientifique ), l’essence ( H. POINCARE ). Elle est un signe qui est l'émanation du social : "la valeur de la monnaie n'est autre chose que ce que la société décide d'y voir" ( J-B. RUFFINI ).


Utilisation du conte d’H.C ANDERSEN " Les habits neufs de l’Empereur "

    Ce texte permet d'introduire la dimension virtuelle de la monnaie : elle est une croyance et peu importe si au fond, cette croyance est fondée ;  mais un problème se pose quand un quidam écouté met en doute la convention ( parallèle avec le "noise trader" ).


Section 2 : Le système bancaire

    I. La masse monétaire et ses contreparties

        A. La masse monétaire

    Elle se décompose en divers agrégats regroupants la quasi-totalité des placements. Bien que floue, la limite entre monnaie et épargne est maintenue : est monnaie ce qui est liquidable rapidement sans incertitude, est épargne le reste.

Au 31 Août 1997, il circulait 5390,7 milliards de francs d’actifs liquides ou semi-liquides. Ces agrégats sont surveillés en permanence par la Banque de France .

Du + ou - liquide

M1 : disponibilité monétaire ou liquidité avec lesquelles on peut payer ( monnaies divisionnaires, papier, scripturale ).
M2 : M1 + l’épargne quasi-liquide ( comptes sur livrets : livrets A, comptes épargne, Codévi...  ) : épargne liquidable instantanément à sa valeur nominale.
M3 : M2 + Les avoirs monétaires facilement négociables ( devises, comptes à terme... ) : c’est l’épargne liquidable rapidement.
M4 : M3 + certains avoirs monétaires ( Bons du Trésor, billets de Trésorerie ) : liquidation assez rapide des placements mais risque de perte en capital.

        B. Les contreparties de la masse monétaire

    Par contrepartie de la masse monétaire, on entend les facteurs qui en sont à l’origine. On n'y trouve plus les stocks d’or de la Banque de France, mais plutôt les crédits aux divers acteurs économiques ( créances sur les acteurs ).

"Battre monnaie" a longtemps été un pouvoir régalien, ou un pouvoir de Prince. Ce principe perdure dans sa substance politique. 

D'un point de vue strictement économique, une institution peut émettre une monnaie parce qu’elle est fiable et reconnue comme telle, c’est à dire parce que les autres, en qui tout le monde a confiance, ont des dettes envers elle ; c’est le coeur de la notion de contrepartie
Certains auteurs mettent en avant l'idée que bientôt les grandes entreprises telles Microsoft?? pourront émettre leur propre monnaie ( thèse de J. ATTALI Dictionnaire du 21ème siècle ). 
Cf. "free banking" de HAYEK.

En somme, on bascule dans le domaine du subjectif : on est apte à produire une monnaie  parce que les autres nous font confiance, et parce qu’on leur fait confiance : ceci explique l'interdépendance des agents, et le risque systémique ( AGLIETTA ) : Krach en Asie -> krach en Amérique Latine -> krach en Europe ???

 

    II . La spécificité bancaire dans l’intermédiation financière

    Le système bancaire, au sens large, n’est pas un tout monolithique : il est fondamentalement hétérogène puisque s’y mêlent des institutions financières et agents financiers divers :

- Les institutions financières soumises à la loi bancaire de 1984 ( communauté bancaire ), parmi lesquelles il est nécessaire de distinguer, d’un côté, les banques et caisses d’épargne et, de l’autre, les sociétés financières ( ex: Cetelem ).
Dans cet ensemble disparate , seules les banques ont le pouvoir de création monétaire.

- Les institutions et agents financiers hors loi bancaire ( Trésor public, service financier de la Poste, Banque de France, caisse des dépôts et consignations).

        A. Intermédiation financière : cas général


Schéma de "transformation"


    L’intermédiation financière concerne l’ensemble des institutions financières. Cette activité consiste à recevoir des dépôts d’agents à capacité de financement ( ressources supérieures aux besoins ) et à accorder des prêts à des agents à besoin de financement ( ressources inférieures aux besoins ), tout ceci sous les contraintes de confiance, liquidité, et solvabilité.

La banque transforme donc les risques ( taux d’intérêt ) et les échéances ( les termes ) et rend compatible des requêtes qui ne l’étaient pas a priori.
L’acte d’intermédiation est bénéficiaire, si la différence entre les intérêts reçus des emprunteurs et les intérêts payés aux prêteurs, est supérieure aux frais de gestion.


Détermination des agents à besoin et capacité de financement dans l'économie

Zinzins : investisseurs institutionnels : +
assurances : +
Mutuelles : +
Sicav : +
Caisses de retraite : +

Etat : -
Banque : + -
Ménages : +
Entreprises : - ( en principe )


On peut schématiser l’intermédiation grâce au bilan d’une banque :
- le passif est constitué par les dépôts des clients, et donc par ce que la banque doit au client
- l’actif, lui comprend les réserves en monnaie centrale ( billets ) et les créances détenues sur les personnes à qui la banque a ouvert un crédit. 
La monnaie bancaire est constituée par les dettes exigibles à vue de la banque, et figure donc au passif de son bilan ; elle constitue une ressource ( passif ) équilibrée par un emploi ( actif ).

Ex : si on dépose 100 FF sur un compte courant dans une banque, la banque a cette somme à son actif ( billets ) mais aussi à son passif, puisqu'elle doit nous rembourser ( dette ), donc la monnaie est un " actif passif ".

 

Exemple : cas simplifié 
 je pose 500 FF dans une institution financière quelconque.

Vous
actif : billets 500-500 =0 compte courant 500

Banque
actif : billets 500
passif : compte courant 500

 

Dans l’intermédiation financière on est face à une simple " circulation bancaire ": l’argent, une fois prêté, n’est plus disponible. La relation est à somme nulle.

Prêteur -500 FF 
Intermédiaire financier 0
Emprunteur + 500 FF

        B. La singularité bancaire : l'opération monétaire

            1. La séquence néoclassique ( NC ) : la "duplication 
   
             monétaire"

des ressources vers les emplois ( passif vers actif )

Exemple : une personne dépose 800 FF en banque et la banque reprète cette somme à un emprunteur.

cas simplifié :
prêteur : - 800
banque : + 800
emprunteur : + 800

somme = - 800 + 800 + 800= + 800
Jeu à somme positive

La singularité bancaire tient à la nature monétaire de la dette bancaire.
En portant 800 FF à la banque, on échange des billets ( créances sur la Banque Centrale ) contre de la monnaie bancaire ( créance sur la banque de 2nd rang ). Dans l'exemple, la masse de monnaie en circulation a augmenté du montant du crédit accordé soit 800 FF.

L’intermédiation bancaire, dans la théorie NC, est donc un jeu d’écritures à somme positive, il y a duplication de la monnaie. Les enchainements de causalité sont les suivants : " les dépôts font les crédits " (" deposits make loans ") et l’épargne préalable permet l’investissement
La véritable dimension de la duplication doit toutefois être précisée, à travers le mécanisme du multiplicateur de crédit.

le multiplicateur de crédit

    C’est un mécanisme d’amplification de la création monétaire. Tout dépôt dans une banque va impliquer une succession de crédits ( puis de redépôts ) dans le reste du système bancaire ( de plus, comme il a été dit précédemment, les dépôts sont en monnaie banque centrale appelée " high powered money " et les crédits sont accordés en monnaie scripturale de banques de second rang ).

Ex : cas ultra-simplifié 
dépôt initial 500 FF, coefficient de billets 10% ( lié à diverses fuites )

somme des crédits accordés = 500 + 450 + 405 +...
=500*( 1 + 0,9 + 0,9²+...+ 0,9n )
=500*((1/1-0,9) (1/1-x )) suite géométrique de raison 0.9
=500 * 10 = 5000

On part d’un dépôt initial de 500 FF et on aboutit à une augmentation de la monnaie bancaire de 5000 FF. Selon la formule générique :

Δ M = k Δ H

k = 1/b

Δ M = variation de la monnaie bancaire
K = coefficient multiplicateur
Δ H = variation du dépôt initial en monnaie centrale ( "high powered money" )
b = coefficient de billets

ex : quelle est la quantité de monnaie bancaire créée dans les conditions suivantes ?

- dépôt initial 800 FF coefficient de billets de 30%

Δ M = 2666,66 FF
30% = 30/100= 0.3
k = 1/0.3 = 3.333
Δ M = 3.333*800

ex: dépôt initial 10.000 FF coefficient de billets de 20%

k = 1/0.2 = 5
Δ M = 5*10.000 = 50.000 FF

ex: dépôt initial 30.000 FF coefficients de billets de 5%

k = 1/0.05 = 20
Δ M = 600.000 FF

Les limites de la création monétaire

    Le pouvoir de création monétaire est limité. A n’importe quel moment, le détenteur de monnaie scripturale peut demander à être remboursé en monnaie centrale ( billets ). Si la banque crée trop de monnaie, elle a des problèmes pour en assurer la convertibilité . 
Les risques de fuite auxquels elle doit faire face sont de deux ordres :

Toute banque se doit donc de conserver une étroite proportion entre sa réserve de monnaie centrale et sa création monétaire afin d’éviter tout risque d’illiquidité et donc d’assumer dans la mesure du possible un phénomène de " défiance " ou de " run ".
Ce critère de solvabilité a été renforcé par la réglementation COOKE adoptée le 11 juillet 1988 ( qui redéfinit une norme minimale de capitaux de base ou de fonds propres ( 8% des actifs pondérés en fonction du risque)).

 


travail sur la notion de "fuite" et de "compensation interbancaire"


        En définitive, les monétaristes ( logique dichotomiste équivalente aux NC ) vont émettre la thèse que dans l'économie, la création de monnaie par les banques dépend en premier ressort, de la base monétaire ( monnaie banque centrale y compris les pièces ) émise par la Banque Centrale ( l'offre de monnaie est donc exogène ).

                2. La séquence keynésienne : la " création " monétaire

  Selon cette optique, la banque crée ex nihilo la monnaie qu’elle prête ; dans ce cas, le mouvement se fait non pas des ressources vers les emplois, mais, des emplois vers les ressources, selon l’adage " les crédits font les dépôts ". Il n’y a pas duplication mais véritablement, création . Selon KEYNES, c’est l’investissement initial, qui va créer une épargne qui lui est égale.

Le diviseur de crédit

    En France, les banques bénéficiaient d’un refinancement automatique de la Banque Centrale et n’avaient donc pas à se préoccuper de leur position de liquidité pour octroyer des crédits. Au fur et à mesure que les fuites se produisaient, elles obtenaient de la liquidité de la Banque Centrale ( en monnaie centrale ).
Le schéma s’inverse, on parle de " diviseur de crédit ".

Δ H = ( 1 / k ) Δ M

Δ H = b Δ M

Ex: une banque a accordé pour 600.000 FF de crédits, le coefficient de billet est de 5%

Δ H = 0.05 * 600.000
Δ H = 600.000/20
Δ H = 30.000 FF en monnaie centrale

    Dans ce mode d'analyse, ce sont les agents non financiers qui de par leurs demandes de crédits, déterminent l'offre de crédit des banques, qui elles-mêmes se retourneront vers la Banque centrale pour se refinancer. En somme, l'offre de monnaie est déterminée par les besoins de l'activité économique  ; elle est endogène.

    III. Des acteurs primordiaux du système bancaire : Banque de
     France et Trésor Public

           A. La Banque de France

    La Banque de France a été créée le 18 janvier 1800 par Napoléon I ; elle tombe sous la coupe du gouvernement par la loi du 24 juillet 1936 et est nationalisée en 1945 ( autrefois elle appartenait aux 200 familles). Le 4 Août 1993, elle obtient un statut d’indépendance équivalent à celui de la BUBA ( BundesBank ). Elle a rempli jusqu'à présent plusieurs fonctions  : 

- Emission de la monnaie légale: elle a le monopole d’émission de la monnaie nationale depuis 1848, on parle d’Institut d’émission.

- La gestion des réserves publiques de change : le gouverneur décide de la valeur ( parité ) du franc Français par rapport aux autres monnaies étrangères ( devises ), et c’est à la Banque de France qu'incombe la tâche d’intervenir pour la maintenir. Elle gère par conséquent, les réserves d’or et de devises de l’Etat.

- La fonction de banques des banques, elle joue le rôle de " prêteur en dernier ressort ". Elle chapeaute le système bancaire, en imposant aux banques de 2nd rang des réserves obligatoires : elle est la garante de la liquidité et de la solvabilité du système. Elle est celle à qui on fait confiance quand rien ne va plus ( " Banque Mère " ).

Ces fonctions sont appelées à subir des modifications puisque la Banque de France est insérée désormais dans le cadre, du système européen de banques centrales ( SEBC ). 

        B. Le Trésor Public

C’est la personnalisation financière de l’Etat:
- il est le caissier de l’Etat, et perçoit à ce titre les impôts, gère la dette publique...
- il emprunte aussi au nom de l’Etat en émettant des Bons du trésor.
- il est enfin le banquier de l’Etat : il prête à l’Etat grâce aux comptes de ses correspondants ( collectivités territoriales ) et peut créer de la monnaie à travers les CCP. 
C'est donc un intermédiaire financier exerçant une activité bancaire.

 

Section 3 : Le financement de l’économie

    I. Les enjeux de la monnaie

        A. Les controverses doctrinales récurrentes

            1. Le débat initial et les théories sous-jacentes

    Dans la première moitié du 19ème siècle, en Grande-Bretagne, un débat fameux eut lieu entre la " banking school " et la " currency school ".

Pour les tenants du " banking principle "( principe de banque ), la monnaie est un moyen de paiement et donc, avant tout, un instrument de crédit, suscité par les besoins de l'économie ( on parlera bien plus tard, de "monnaie endogène" ). La création monétaire est un viatique, qui se doit d'être souple afin de s’adapter auxdits besoins, et par conséquent, d'assurer d’autres objectifs dans l’économie comme la croissance...
Aussi, la monnaie suit comme "l'intendance", les besoins de l'homme d'affaires ( Cf. H. GUITTON ).

Selon cette école, le crédit bancaire ne peut jamais être à l'origine d'une éventuelle inflation ( car il y a eu une stricte proportion entre crédits bancaires et besoins de l'économie). Seuls les abus spéculatifs doivent être contrôlés ( TOOKE ).

A contrario, les tenants du " currency principle " ( principe de circulation : RICARDO ), proclament que toute banque doit maintenir en vertu des critères de convertibilité, une stricte égalité entre la quantité de billets mise en circulation et son fondement véritable : la quantité d’or . 
Dans cette perspective, la valeur de la monnaie lui est conférée par le recours à un argument externe ; plus tard M. FRIEDMAN mettra en avant la notion de règle "constitutionnelle" d'émission monétaire : on parlera alors de "monnaie exogène" avec comme idée récurrente la nécessité de la norme. 
Cette théorie est basée sur l’idée que la monnaie n’est qu'un " voile ", que la richesse véritable se trouve dans le travail et dans les biens; c'est à dire dans le secteur réel de l'économie ( loi de SAY " les produits s'échangent contre les produits").

L'histoire va donner raison aux idées ricardiennes ( 1844 : actes de PEEL ). Pour RICARDO et l'école de pensée qui assurera son héritage, le seul objectif de la monnaie est d'assurer au mieux le jeu des automatismes économiques en restant neutre et stable.

            2. Les controverses actuelles

    De nos jours, ce clivage entre partisans d'une monnaie "neutre" et d'une monnaie "active", se retrouve.

Les classiques et néo-classiques pensent que les effets de la monnaie sur la production sont nuls : on reste dans une logique de "quasi-troc". Il existe une dichotomie entre le réel et le monétaire (" économie réelle de production "), qui plus qu'une juxtaposition est un "clivage préférentiel" ( réel > monétaire ) ( cf.  B. SCHMITT ). L'accroissement de la masse monétaire, crée une "illusion monétaire" qui ne peut modifier à long terme les données réelles de l'économie. Cette approche s'appuiera sur la quantitativisme mis en équation par Irving FISHER au 20ème siècle, et sur le monétarisme de M. FRIEDMAN .

    Cependant, il est intéressant de noter, que ce courant passe d'une vision en terme de neutralité de la monnaie, à une vision en terme de neutralisation de la monnaie ( FRIEDMAN défendant la thèse que la monnaie est active, mais à court terme ), ce qui constituera la norme des politiques monétaires dans le début des années 80 dans le monde occidental. Avec la Nouvelle Macroéconomie Classique ( NMC ), et l'hypothèse force des Anticipations rationnelles ( R. LUCAS ), la monnaie n'est même plus active à court terme ( sous certaines réserves : effet de surprise ), néanmoins les autorités doivent maintenir une politique de la règle ( crédibilité, réputation, cohérence temporelle...) pour corseter la monnaie, a priori.
L'idée de norme est poussée encore plus avant,  à l'heure actuelle, avec la notion de "norme active".

A contrario, J- M. KEYNES, met en avant l'idée, que la monnaie est active ( vision intégratrice réel et monétaire ), qu'elle influence le niveau général de l'activité économique ( Investissement, consommation, production… ) au sein d'une "économie monétaire de production". La monnaie est en fait première, car elle préfinance la production, et peut même être demandée pour elle-même ( préférence pour la liquidité des agents ).
Une politique monétaire discrétionnaire peut s'avérer être dans cette optique un levier d'intervention adéquat, afin de relancer l'activité économique en rétablissant la confiance des entrepreneurs.

        B. Faits et méfaits en économie : une histoire de théories

    En fonction des conceptions de la monnaie, définies au préalable, les économistes vont désigner les réactifs et les produits, de la monnaie dans l'économie. J-P DUPUY professeur à l'Ecole polytechnique, définit ces imbrications fort judicieusement :

L'argent est un objet bien singulier en vérité. Quand tout le monde veut le posséder ( le " thésauriser " ), il perd sa valeur, il s'évanouit en fumée ( c'est la crise de déflation keynésienne ); quand tout le monde veut s'en débarrasser, le refiler aux autres, il perd sa valeur aussi bien ( c'est la crise inflationniste ). Pour que l'argent garde sa valeur, il faut donc qu'il circule constamment, régulièrement, sans panique, sans précipitation certains acceptant de le détenir momentanément en sachant qu'ils pourront s'en débarrasser le moment venu. "

J-P DUPUY     Introduction aux sciences sociales     ellipses     1992

Ainsi, tandis que les keynésiens mettent l'accent sur le danger de la déflation, les monétaristes pointent du doigt l'inflation comme mal absolu.

            1. Définitions

L'inflation est la hausse auto entretenue, du niveau général des prix, mais aussi la déformation de la structure des prix relatifs
 L'inflation calculée par l'INSEE, pour la France, est la moyenne pondérée de l'indice des prix à la consommation, de 266 postes, représentant plus des 9/10 des biens et services consommés par les ménages.

La déflation est la baisse du niveau général des prix ( grandeurs nominales puis souvent réelles ). Elle est le signe ostensible d'une crise généralisée ( exemple : crise de 1929 ).

La désinflation est la baisse du taux d'inflation. Les prix continuent d'augmenter, mais moins vite ( il n'y a donc pas de baisse des grandeurs réelles, des quantités achetées ). La France a connu dans les années 80, une période de désinflation ( baptisée " désinflation compétitive ") : l'inflation passant de 14% en 1981 à 2,1% en 1986.

            2. les analyses de l'inflation

Les quantitativistes depuis J. BODIN ( 16ème siècle ), estiment qu'il existe un lien direct entre la masse monétaire et le niveau général des prix ; ce qu'Irving FISHER va mettre en équation :

M*V= P*T

masse monétaire * vitesse de circulation de la monnaie = niveau général des prix * volume des transactions

C'est la " formule quantitative de la monnaie ".

L'inflation, pour cette école, est toujours et partout un phénomène purement monétaire qui vient d'un trop plein de monnaie mis en circulation ( offre de monnaie trop importante de la Banque Centrale).

Milton FRIEDMAN, prix Nobel d'économie en 1976, principal chantre de la théorie monétariste, a donné un souffle nouveau à cette thèse qui a eu un grand retentissement dans le monde occidental : États-Unis, Europe. Pour ce dernier, l'inflation est l'ennemi " numéro un "en économie, qu'il convient de combattre par un contrôle draconien de l'augmentation de la masse monétaire. La neutralisation de la monnaie, pour qu’elle ne fausse pas les mécanismes autorégulateurs du Marché à court terme  ( économie réelle de production ), est devenue paradoxalement une fin en soi.

Pour d'autres écoles de pensée, les causes de l'inflation peuvent être recherchées dans le secteur réel de l'économie, cependant elle n'est pas forcément à proscrire aussi fermement ( Cf. courbe de Phillips pour les keynésiens de la synthèse ).

- L'inflation par la demande est issue du paradigme keynésien. Lorsque la demande est supérieure à l'offre de biens et que cette dernière ne peut s'adapter ( on parle d'une " élasticité faible "), cela crée de l’inflation.

- L'inflation par les coûts : son origine se situe au cœur du processus productif : l’augmentation des salaires, des prix des consommations intermédiaires et la volonté de l'entreprise de conserver sa marge de profit entraînent une hausse des prix.

- L’inflation par les structures : cette explication met en avant l'idée que l’inflation provient du mode de fonctionnement inhérent au capitalisme : marché oligopolistique, prix rigides à la baisse... L'inflation peut être aussi le résultat de facteurs sociaux ( négociations salariales, intervention de l'Etat...).

Actuellement la théorie libérale, monétariste puis par la suite NMC, domine : la lutte contre l'inflation devient la priorité de nombreux pays de l’OCDE. Cette politique favorise les rentiers au détriment de l'économie réelle et des personnes qui s’endettent, d'où sa remise en cause par certains économistes, tel Alain COTTA.

    II. Le financement des activités

    Lors d’un financement externe c’est à dire d’un recours à l’extérieur ( le contraire étant le financement interne ou autofinancement ), l’agent à besoin de financement se trouve en face de deux choix :
- la première occurrence est le financement intermédié où la banque, ou tout autre intermédiaire financier s’intercale, entre lui et l’offreur de monnaie  ; on parle ici de financement monétaire en cas de création de monnaie.
- la deuxième est le financement direct où les agents se retrouvent sur le Marché.

        A. Le financement intermédié ( indirect ): la priorité
             Keynésienne

Pour KEYNES, la finalité de l’économie est le " plein emploi ", et la monnaie est un moyen d’intervention dans l’économie pour parvenir à ce résultat. Le moteur de la dynamique capitaliste, est dans cette optique, l’investissement ( et dans une moindre mesure la consommation ) et non l’épargne. En effet, pour cet auteur, l’épargne est improductive, et peut conduire, à travers les mécanismes boursiers, à la création d’une " économie de casino " : la solution serait donc d’" euthanasier le rentier ".

Les spéculateurs peuvent être aussi inoffensifs que des bulles d’air dans un courant régulier d’entreprises. Mais la situation devient sérieuse lorsque l’entreprise n’est plus qu’une bulle d’air dans le tourbillon spéculatif. Lorsque dans un pays le développement du capital devient le sous-produit de l’activité d’un casino, il risque de s’accomplir en des conditions défectueuses ".

J. M KEYNES     La théorie générale...     Payot     livre 4     chap 12     p173

Pour les Keynésiens, l’épargne est un résidu dépendant de l’importance du revenu. Selon la loi psychologique fondamentale, " les hommes ont tendance à accroître leur consommation à mesure que leur revenu croît mais non d’une quantité aussi grande que l’accroissement du revenu ". Quand le revenu augmente, la propension à consommer baisse.

Revenu --> Consommation --> Taux d’intérêt --> thésaurisation ou épargne

Dans la tradition keynésienne, les banques occupent une place prépondérante, puisque ce sont elles qui en accordant les crédits vont permettre à l’activité économique de se développer. Empiriquement, on peut évoquer cette vision à travers le vocable de J. HICKS, à savoir " l’économie d’endettement " ( "overdraft economy" ).
Cette tradition plaide aussi en faveur d’un taux d’intérêt faible à long terme ( même si ce n'est pas l'élément principal ), en vue de favoriser l’investissement des entreprises ( de capacité en particulier ).
La condition sine qua non du fonctionnement de l’économie est, pour les keynésiens ( post-keynésiens en particulier ), la confiance en l’avenir ( l’ennemi n°1 est l’Incertitude ).

        B. Le financement direct, désintermédié : la priorité
             néoclassique ( NC )

    Les NC, quant à eux, se font les chantres des marchés financiers, qui se rapprochent le plus des postulats des marchés parfaits : ils plaident donc, de fait, pour une économie dite "de marchés financiers " ou "auto economy".

Sur ces marchés, règne en maître le " laisser faire, laisser passer " assurant un " optimum  économique", grâce à un mécanisme autorégulateur.

            1. Le rôle central de l’épargne

    Pour les NC, l’Epargne ( S comme Savings ) est une renonciation à la consommation ( C ) immédiate et donc une consommation différée dans le temps ( en espérant une consommation future plus importante ). Cet arbitrage entre consommation présente et future est fonction du taux d’intérêt.

Revenu --> taux d’intérêt--> consommation ou épargne

Cf. arbitrage intertemporel ( I. FISHER )

Une illustration de cette vision "sacrificielle" de l'épargne nous est fournie par G. GILDER dans Richesse et pauvreté ( ouvrage de chevet du président R. REAGAN durant ses mandats ).

L’Epargne peut être encouragée par les gouvernements sous forme d’exonération de taxes et d’abattements. Elle peut être aussi placée sur les marchés financiers et ainsi, être disponible pour les agents qui en ont besoin.
Ex : promotion de la retraite par capitalisation.

            2. Les marchés de capitaux : des marchés compartimentés

                a. Le marché monétaire

    C’est le marché des capitaux courts ou moyens ( inférieurs à 7 ans ). Il se divise en 2 :

- le marché interbancaire : il détermine le taux de l’argent à court terme : c’est en fait le coût de l’argent pour le banquier et donc, a priori, le taux d’intérêt le plus bas ( taux de base bancaire ).

- le marché des titres courts : on y trouve aussi des titres négociables de 10 jours à 7 ans. Il est ouvert à tous les agents économiques : une restriction cependant, le moindre achat ou vente se monte à 1 million de francs. Les OPCVM ( organisation de placement collectif en valeurs mobilières ) y ont accès. Fin 1989, les billets de trésorerie ( émis par les entreprises ) se montent à 129 milliards de francs. Les certificats de dépôts émis par les banques se montent à 546 milliards de francs. Les Bons du Trésor négociables ( émis par le Trésor Public ) se montent à 520 milliards de francs.

                            b. Le marché financier

                    i. Les différents types d'actifs

- Une action: est un titre émis par une société, représentant une fraction de son capital social. Elle procure un revenu ( dividende en fonction des résultats des sociétés ), et permet à l'actionnaire de participer aux décisions de l'entreprise ( conseil d'administration ). Son prix effectif varie en Bourse. Un rachat par offre publique d'achat ( OPA ), est possible à partir du principe de l'actionnariat.

- Une obligation est une valeur rapportant un revenu ( intérêts ) et un titre de créance à long terme sur l'agent qui l'a émise. Ex : Entreprises, banques, Etat...

Ex : emprunt La POSTE
taux d’intérêt nominal : 9 %
obligation : 5000 FF
durée : 9 ans
amortissement à la fin, le 18 novembre 2000
premier coupon payable le 18 novembre 1992 ; soit 450 FF/ an

- Les produits collectifs en valeurs mobilières: les OPCVM ( organismes de placement collectif en valeurs mobilières) collectent l'épargne auprès du public afin de la placer sur les marchés financiers.

Ex : SICAV ( société d’investissement à capital variable ), dont la fonction est d’attirer le petit épargnant.
Une des plus grande SICAV du monde a été dans le début des années 90, la SICAV " Magellan " qui représentait 900 milliards de $.

                    ii. L'hétérogénéité du marché financier

Les différents marchés
    Le marché financier est le lieu d’émission et d’échange de titres longs ( > 7ans ) appelés valeurs mobilières ( actions et obligations ). Ce marché est compartimenté, il comprend :

- un marché primaire ou marché du neuf qui concerne les émissions nouvelles de valeurs mobilières qui ont pour objet d’apporter du capital à l’émetteur. C’est par le biais de ce marché que la bourse assure sa fonction de financement direct de l’économie ( il favorise donc l’investissement véritable ). Toutefois, ce marché ne concerne que 5 à 10 % du volume des échanges de titres selon R. PASSET.

- un marché secondaire ou marché de l’occasion: sur ce marché se font des transactions ( achats ventes ) de titres déjà émis. Ainsi, les détenteurs d’actions et d’obligations ont la possibilité de les revendre à tout moment. Sans ce marché secondaire qui assure la liquidité des titres, il ne pourrait y avoir de marché primaire. A l’occasion d’une transaction sur le marché secondaire, l’émetteur de l’action n’est pas concerné par cet échange, il ne collecte pas de nouveaux capitaux puisque tout se passe entre épargnants : on est en présence d'une logique de placement qui équivaut à de l'épargne pure et simple.

Les cotations des valeurs ont lieu sur divers segments du marché : 
- la cote officielle : ce marché regroupe les actions et les obligations des sociétés françaises et étrangères importantes . L’admission des sociétés se fait à un certain nombre de conditions. Elle leur permet d’accéder au marché au comptant et pour les plus grandes d’entre elles au marché à règlement mensuel.
- Le second marché créé en 1983 permet aux entreprises de taille moyenne de réaliser des augmentations de capital.
- Le nouveau marché créé en 1995, sur le modèle du NASDAQ américain, est destiné aux sociétés à haut potentiel de développement en particulier dans le domaine des nouvelles technologies.

Cf. Bourse de Paris

Les opérations
Sur les marchés, le dénouement d'une transaction, achat et vente, peut avoir lieu le jour même, ou à la fin du mois boursier ( opération à terme : marché à règlement mensuel ).
Le principe des opérations à terme est le suivant : un acheteur croit en une hausse du cours d'une action par exemple et pense acheter bon marché, aujourd'hui, un titre qu’il revendra ultérieurement à un cours plus élevé. A l'inverse, le vendeur quant à lui, croit en une baisse du cours et vend aujourd’hui des titres qu’il ne possède pas afin de les racheter à un moindre prix.

En introduisant un décalage temporel, l'opération à terme permet la spéculation. Il faut prendre ce terme sans connotation péjorative, a priori : "speculare" veut dire prévoir ; et sans spéculateurs, "risk lovers", l'activité économique ne pourrait fonctionner, car ce sont eux qui supportent le poids du risque et permettent de prime abord, le bouclage financier du système ( toutefois celle-ci peut-être déstabilisante à terme ).

 

                        c. Les Marchés dérivés

- Sur les Marchés dérivés s'échangent des contrats se rapportant à des actifs susceptibles de varier amplement, qui concernent tant le marché financier que les devises ou le marché monétaire.  

Les marchés dérivés, se sont inspirés de la logique des marchés à terme de matières premières, où le contrat ( opération papier  : engagement ferme de vendre ou acheter à une période donnée ) avait pour but originel, de protéger les agents des fluctuations du futur, incertain par définition.

Exemple : on est en janvier et le prix de la tonne de soja est à un cours idéal pour l'acheteur que je suis ; cependant je n'aurais besoin effectivement de ces tonnes de soja qu'en avril ( et je ne peux les stocker à présent ) : comment faire ?
Je dois procéder à une opération papier qui compense, l'opération physique.

Janvier instant t0 Avril t1  
prix p0 achat au comptant au prix p1, de 10 tonnes de Soja opération physique au comptant
achat de contrats à terme au prix po revente de contrats à terme au prix p1 Opération papier contrat à terme
coût : p0 coût : p1
gain : p1
 

total : p1-p1-p0 = p0

L’opération m’a coûté p0 : j’ai acheté 10 tonnes de soja pour avril au prix de janvier : je me suis couvert contre le risque.
On appelle ce type d'opération un "arbitrage en couverture d'effectif ". Dans ce répertoire, il existe aussi les "opérations à cheval". 
Cependant, au fil du temps les opérations papier se sont libérées, de la contrainte des opérations physiques. Ces types de marché font croître une spéculation devenant un problème explicite lorsqu'elle sort de sa fonction initiale, et en vient à modifier intrinsèquement les données financières et réelles de l'économie, dans une perspective de gain à court terme; elle n'apparaît plus aussi stabilisatrice que le clamait M. FRIEDMAN.

En France, le MATIF ( Marché à Terme International de France ) créé en 1986, porte sur des contrats concernant le marché financier, le marché monétaire voire le change, et le MONEP ( marché des options négociables de Paris ) propose quant à lui des options sur actions et indices boursiers. 


possibilité de créer des séquences de travail sur la Bourse ( OPA, raiders, opération à terme... ) à partir des articles suivants


Tableau sur les visions théoriques des marchés financiers

Exercice récapitulatif sur la monnaie

Conclusion

    Les années 80 d’obédience libérale ( contrairement aux années d'après-guerre, plutôt keynésiennes ( courant de la synthèse ), ont été celles des " 3 D "d’après H. BOURGUINAT :

- " déréglementation "
- " décloisonnement "
- " désintermédiation " .

Durant cette période, la déconnexion entre la sphère financière et réelle n'a cessé de croître : l’argent ayant tendance à être placé sur les marchés financiers, plutôt que dans le secteur productif ( industrie ), à telle enseigne que ce sont désormais les marchés financiers qui imposent leurs politiques aux gouvernements ( notion de "prime de risque" ).

De plus, la Bourse est fragilisée par les anticipations irrationnelles des agents ( retour sur la notion de mimétisme ), qui font varier les cours boursiers de manière incontrôlable et non justifiée ( en apparence ), et l'expansion de produits financiers douteux. La place qu'occupe la Bourse, de nos jours fait penser à "l'économie de casino " que dénonçait KEYNES. La solution mise en avant par de nombreux auteurs, apparaît être la " reréglementation " à travers, en particulier, la taxation des mouvements de capitaux spéculatifs: ex : la taxe TOBIN du nom du prix Nobel d'économie 1981.

    III. Les politiques monétaires

La politique monétaire, comme son nom l'indique vise à atteindre des objectifs économiques réels ( consommation, emploi, investissement…) grâce à des moyens monétaires.

Afin d'atteindre un objectif final ( plein emploi, stabilité de la valeur de la monnaie…), les autorités monétaires se fixent des objectifs intermédiaires ( croissance de M3 par exemple…).

Le terme de "politique" est de nos jours quelque peu vidé de sons sens originel, dans la mesure où par exemple la Banque de France est devenue indépendante du gouvernement depuis 1993. Elle n'est plus inféodée au contrôle démocratique des citoyens, mais reste asujettie à des normes théoriques ( NMC en particulier ), et concrètes , imposées par les marchés financiers.

Les instruments de politique monétaire à disposition :

- La BC ( banque centrale ) peut réguler indirectement la masse monétaire en jouant sur le taux de réescompte , sur les taux directeurs ( impact sur la demande de crédits ), sur les réserves obligatoires  . Elle peut enfin jouer sur les liquidités ( impact sur l'offre de crédits ) et ainsi agir sur le coût du refinancement, quand le marché monétaire est ouvert à de nombreux intervenants ( "open market") en particulier.

-Il existe aussi des mesures réglementaires permettant de façon directe de contrôler la masse monétaire comme l'encadrement du crédit supprimé en 1986.

Les objectifs et les moyens d'intervention ne sont, au demeurant, que les pâles reflets et instruments de théories économiques sous-jacentes :

-pour les keynésiens, la régulation de l'économie de Marché, passe par des interventions discrétionnaires en matière monétaire en particulier : la politique de la Banque centrale ( sous la direction du gouvernement ) doit donc faire varier les taux d'intérêt  via le réescompte, afin d'influencer l'activité économique en vue du plein emploi ( objectif final ) : ceci a donné les politiques d'arbitrage entre inflation et chômage dites de "stop and go" ( avec "fine tuning" ), de l'après 2ème guerre mondiale à la fin des années 70.

-Pour les monétaristes, la politique monétaire doit viser la neutralisation de la monnaie en édictant de règles strictes ( "règle d'or" ) en matière de croissance de la masse monétaire ( surveillance des agrégats et lutte contre l'inflation ), ceci afin de garantir à la monnaie sa stabilité et sa valeur, interne et externe ( ex : P. VOLCKER ( président de la FED ) aux E-U en 1979 ). Les instruments privilégiés furent dans un premier temps, les réserves obligatoires, puis de plus en plus "l'open market" .
Car désormais , ce sont les partisans de la NMC qui ont le vent en poupe, et parviennent à imposer leur vision : indépendance des banques Centrales en vertu du principe de "cohérence temporelle", rôle principal du taux d'intérêt directeur...( il apparait ici, plus que nécessaire de bien dissocier, l'analyse de FRIEDMAN et des partisans de la NMC qui sont aux antipodes sur le statut de la Banque centrale et sur les questions concernant l'offre de monnaie : à  transformer en variable aléatoire pure ou non ?? ).

Conclusion

    Le débat sur la réalité monétaire reste vivace, de nos jours encore, et, peut être résumé par l’intervention au 19ème siècle du député anglais GLADSTONE qui, lors d’un débat parlementaire sur les " Banks Acts " de Sir John PEEL, faisait remarquer que l'amour lui-même n'avait pas fait perdre la tête à plus de gens, que les ruminations sur l'essence de la monnaie.

 

Bibliographie

      * Livres

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- CALABRE. S   Evolution des prix des produits de base    Economica    1990
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- DE MOURGUES. M    La monnaie     Economica    1989
- DUPUY. J-P    Introduction aux sciences sociales      Ellipses   1992  
- GALBRAITH. J-K     Brève histoire de l'euphorie financière     Seuil    1992
- GUITTON. H            La monnaie        Dalloz  1983
- LANDAIS. B     Le monétarisme     Economica     1987
- MONTOUSSE. M et CHAMBLAY. D     100 fiches pour comprendre les sciences économiques     Bréal     1998
- MUSOLINO. M     L'imposture économique     textuel    1997
- ORIO. L et J-J. QUILES     L'économie keynésienne     Nathan    1994
- SIMON. Y     Bourses de commerce et marchés à terme de marchandises     Dalloz   1987
- SACLE. A et GOLDSCHMIDT. M     Le marché à terme     Ed. de l'organisation    1974
- SCHMITT. B     Monnaie, salaires et profits     castella     1980
- Ss la dir. de R. DI RUZZA et J. FONTANEL     Dix débats en économie politique   PUG 1994
- Ss la direction de C-D. ECHAUDEMAISON     L'économie aux concours des grandes écoles de commerce     Nathan     1996

    * articles et revues

- M. LAVOIE et M. SECARECCIA     "Les idées révolutionnaires de KEYNES en politique économique et le déclin du capitalisme rentier"     Economie appliquée     1989     N°1
- ARROUS. J     "KEYNES et les probabilités : un aspect du fondamentalisme keynésien" Revue économique     N°5     Septembre 1982
sciences humaines     N°68     Janvier 1997
"Anatomie de la crise financière"         Manière de voir     N°42     nov-déc 1998


 

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- mise à jour le 04/03/2000

 

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