mis à jour le 04/07/2002
LA MONNAIE
et le financement de l'économie
Plan du cours
Section 1 : La nature de la monnaie
I. Généalogie de la monnaie
A. La monnaie à travers l’Histoire
B. Les composantes actuelles de la
monnaie
1. La monnaie fiduciaire
( monnaie "matérialisée" )
a)
la monnaie divisionnaire
b) la monnaie-papier
2. La monnaie scripturale
( monnaie "dématérialisée" )
II. Les différentes théories sur la nature de
la monnaie
A. L’analyse " instrumentale " de
la monnaie, par ses fonctions
1. La monnaie est une
unité de compte : divisibilité
2. La monnaie comme
réserve de valeur : durabilité
3. La monnaie comme
moyen de paiement : acceptabilité
B. L'approche "essentielle" de la
monnaie
Section 2 : Le système bancaire
I. La masse monétaire et ses contreparties
A. La masse monétaire
B. Les contreparties de la masse monétaire
II . La spécificité bancaire dans l’intermédiation
financière
A. Intermédiation financière : cas
général
B. La singularité bancaire : l'opération
monétaire
1. La séquence néoclassique
( NC ) : la "duplication monétaire"
2. La séquence keynésienne
:la " création monétaire"
III. Des acteurs primordiaux du système bancaire
: SEBC, Banque de France et Trésor Public
A. Le SEBC et la Banque de France : la
hiérarchie du système bancaire
1. Le SEBC
2. La Banque
de France
B. Le Trésor Public
Section 3 : Le financement de l’économie
I. Les enjeux de la monnaie
A. Les controverses doctrinales récurrentes
1. Le débat initial et
les théories sous-jacentes
2. Les controverses actuelles
B. Faits et méfaits en économie : une
histoire de théories
1. Définitions
2. les analyses de l'inflation
II. Le financement des activités
A. Le financement intermédié ( indirect
): la priorité Keynésienne
B. Le financement désintermédié ( direct
) : la priorité néoclassique ( NC )
1. Le rôle central de
l’épargne
2. Les marchés de capitaux
: des marchés compartimentés
a. Le marché
monétaire
b. Le marché
financier
c. Les marchés
dérivés
III. Les politiques monétaires
Glossaire
pour les notions clés du cours ( action, obligation, taux d'intérêt,
crédit, autofinancement, besoin de financement, capacité de financement...).
Cours
"Le
plus incroyable, c'est cette brusque révélation que la monnaie serait une
chose concrète, alors que toute le monde sait parfaitement qu'il s'agit
seulement d'une vague notion, pas même d'une abstraction. Car on est
incapable de décider une fois pour toutes de quoi elle serait l'abstraction".
J. R SAUL
Les bâtards de Voltaire Essai Payot
1993 p.
427
"Posséder de l'argent, c'est réussir à posséder ( virtuellement ) tout ce que les Autres possèdent et que je désire, tout en ne possédant ( réellement ) rien, sinon l'incarnation matérielle, sans valeur intrinsèque, d'un signe qui, lui, ne peut se posséder, puisqu'il renvoie à une transcendance ( celle du collectif par rapport à ses éléments individuels ). La possession de l'argent, c'est le comble du désir de possession se manifestant sous la forme du renoncement à la possession".
J-P DUPUY Introduction aux sciences sociales Ellipses 1992 p. 267
Section 1 : La nature de la monnaie
I. Généalogie de la monnaie
A. La monnaie à travers l’Histoire
Selon la thèse la plus répandue et comme semble de prime
abord l'attester la numismatique ( science qui traite de la description et de
l’histoire de la monnaie), la tendance générale de l’évolution monétaire, serait
celle d’une dématérialisation croissante de la monnaie, selon une perspective
historique unilinéaire. Ladite monnaie serait l'instrument fondamental, de l'amélioration
des échanges depuis le troc originel.
Epoque
|
inventions
|
norme monétaire
|
base de la valeur
|
Préhistoire |
lingots de métal
|
|
|
Antiquité |
|
marchandises ( sel, huile, blé, bronze, électrum...
)
|
emploi sous forme de marchandises
|
VIIème av J.C
|
pièces de métal ( avec poinçon ) en Lydie ( Asie mineure
)
|
|
|
14°siècle
|
billet à ordre (chèque )
|
|
|
1656
|
Billets (banque de Suède)
|
|
|
jusqu’à la fin 18°s |
|
métaux précieux ( or et argent )
|
rareté des métaux
|
19°siècle |
|
monnaie-papier ( billets de banque convertibles et virements
)
|
confiance et convertibilité
|
20°siècle |
|
billets inconvertibles , virements, et cartes magnétiques
|
confiance dématérialisation
|
21°siècle |
|
cartes magnétiques ?
|
B. Les composantes actuelles
de la monnaie
1. La monnaie
fiduciaire ( monnaie "matérialisée" ou manuelle )
La dénomination de monnaie "fiduciaire" ( fiducia
= confiance. Cf Dictionnaire Robert ) vient du fait que
sa valeur faciale, est supérieure à sa valeur "réelle", mesurée par le
poids de papier ou de métal ( pièces et billets n'ont aucune valeur sui generis
) : c’est une monnaie à laquelle on fait confiance, de fait.
a) la monnaie divisionnaire
Elle est composée de pièces ( émises par le Trésor Public
et frappée à l’Hôtel de la Monnaie ( en particulier à Pessac ) dans le
cas du feu, "Franc Français" ). On parle de
monnaie "divisionnaire", car elle permet de régler des achats de faible
valeur.
b) la monnaie-papier
Elle est composée essentiellement de billets émis par
la Banque Centrale.
2. La monnaie scripturale ( monnaie dématérialisée )
La monnaie scripturale ( de scriptura = écriture
en latin. Cf Dictionnaire Robert ) est
constituée par l’ensemble des inscriptions dans les comptes en banque. Elle
circule d'un compte à un autre par simple jeu d'écritures, manuelles ou électroniques,
grâce à des supports tel que le chèque, le virement, la carte magnétique.
Cette forme de monnaie est majoritaire dans les pays développés bien que difficilement
cernable ; les dépôts dans les banques étant soit à vue ( c’est à dire immédiatement
utilisables ) soit à terme ( bloqués pendant une certaine durée).
La monnaie est donc a priori, un actif
accepté par des agents sur un espace donné, en règlement d'une transaction ou
extinction d'une dette. De ce point de vue, l'or, symbole de la monnaie
marchandise, parce qu'il n'incarne aucunement une dette ( d'où sa qualité de
valeur refuge, en période de crise majeure ), peut être considéré comme le parangon
de l'actif réel.
Mais s'en tenir à ce type de définition est réducteur, dans la mesure où la
monnaie est aussi un passif : toute créance d'un individu sur un autre,
est fondamentalement une dette de ce dernier vis à vis du premier. Par voie
de conséquence, la monnaie incarne une dette, en particulier des agents bancaires
envers les agents non bancaires : la notion de confiance est donc primordiale
( cf. notion de liquidité ).
II. Les différentes théories sur la nature
de la monnaie
A. L’analyse " instrumentale "
de la monnaie, par ses fonctions
Cette approche considère que la monnaie est une marchandise
comme les autres, dont l'intérêt se résume à ses fonctions ou qualités ; ainsi
les supports monétaires ont en commun :
- leur divisibilité, ils permettent de mesurer petites et grandes valeurs
- leur validité, leur valeur intrinsèque est universellement reconnue
- leur durabilité, leur durée de vie dans le temps garantit la conservation
du pouvoir d’achat.
1. La monnaie
est une unité de compte : divisibilité
Le problème fondamental posé par l’échange, consiste
en une détermination la plus "équitable" ( égalitaire ??? cf. Justice "commutative"
[ le terme est en fait de SAINT THOMAS ] chez ARISTOTE dans Ethique à
Nicomaque ) possible, de la valeur des produits échangés. Si l'on se
réfère à la valeur d’échange ( exit donc, la valeur d'usage subjective
), constatée objectivement, qui représente la valeur moyenne accordée dans un
espace donné à un bien donné, et que l’on considère que le prix déterminé par
les offres et les demandes en donne une bonne indication ; il reste à trouver
l’étalon qui permettra de déterminer la valeur, in fine.
La loi de WALRAS
( la problématique du " n-1 " )
Chaque marchandise en l’absence d’unité de compte, verra
sa valeur définie, en fonction de la quantité de chacune des autres marchandises
, qu’elle peut représenter : on est ici en présence de valeurs relatives.
Soient 6 biens, A, B, C, D, E F :
en régime de troc, le nombre de combinaisons possibles est de 15 :
A/B A/C A/D A/E A/F B/C B/D B/E B/F C/D C/E C/F D/E D/F E/F
En l’absence d’étalon commun à tous les biens, l’évaluation de toutes les valeurs
relatives, constitue un obstacle insurmontable ; ainsi dans le cas où l’on a
40 biens à évaluer, cela signifie 780 combinaisons possibles ; analyse combinatoire :
la formule générique est pour n biens C²n = n!/(n-2)!*2! = n ( n-1 ) / 2
Si on choisit, dans l’exemple précédent, un des biens comme étalon en lui donnant
la valeur 1, le nombre de combinaisons est moins important, il est de n-1 (
40-1 = 39 ) soit 39 prix.
2. La monnaie
comme réserve de valeur : durabilité
Selon J-M
KEYNES : " L'importance de la monnaie découle essentiellement du
fait qu'elle constitue un lien entre le présent et l'avenir ". Ainsi, elle
peut être conservée afin de reporter dans le temps des achats. Le risque, est
toutefois, de voir la valeur de la monnaie décroître pour cause d'inflation
( baisse du pouvoir d'achat ).
3. La monnaie
comme moyen de paiement : acceptabilité
On peut se demander si la fonction de moyen de paiement
n'est pas subordonnée à la confirmation des fonctions précédentes. Par exemple,
la notion de réserve de valeur est fondamentale pour celui qui reçoit le paiement
en monnaie, et s’apprête à conserver ladite monnaie ; elle conditionne de fait,
l’acceptation de la monnaie comme moyen de paiement. La monnaie est acceptée
d'autant plus facilement qu'elle bénéficie d'une certaine "aura
cumulative", que
lui confère son acceptation : le processus de la "dollarisation" ( P.
SALAMA ) en est un exemple flagrant.
Le choix d’une forme de monnaie particulière résulte
donc, de la cristallisation ( autour d’un métal ou d’une monnaie nationale )
de ces trois fonctions indissociables précitées : le dollar en est aujourd'hui
l'exemple le plus abouti.
Séquence de sémantique
Travail sur le dollar
Le dollar est-il une "monnaie internationale" ( cf. M. DUPUY Le dollar Topos Dunod 1999 ) ou un "moyen de paiement international" ( cf. DESTANNE DE BERNIS. G Relations économique internationales Dalloz 5è Ed. 1987 ) ?
B. L'approche "essentielle"
de la monnaie
Les origines de la monnaie selon la vision "morphogénètique" (
Cf. J-P DUPUY ).
René GIRARD ( 1923- ), philosophe français vivant aux Etats-Unis et qui a enseigné à l'Université Stanford de Californie, a donné une explication universelle du fonctionnement social. D'aucuns le tiennent pour un penseur de la puissance d'un FREUD, ou d'un MARX, avec "la vérité en plus".
Selon lui, le problème
fondamental auquel est confronté tout ordre social, est la canalisation de la
violence, née du désir mimétique d'appropriation. En effet, l'homme est
la créature qui, au delà, des besoins essentiels, désire intensément mais sans
savoir vraiment quoi : il en vient par conséquent à désirer ce que l'autre désire ( cette
théorie s'oppose donc à la vision freudienne, où l'homme désire sa mère par exemple
).
Dès lors, la rareté inhérente à la condition humaine
fait que tout bien est susceptible d'être convoité par plusieurs individus,
qui risquent d'utiliser la violence pour se l'approprier ( "rivalité
mimétique" ). Par l'avènement du sacré, les sociétés vont parvenir
à transformer ce mimétisme d'appropriation en mimétisme d'exclusion. Le stratagème
consiste à trouver une victime émissaire, sur laquelle sera focalisée la violence,
ainsi exclue du champ social quotidien.
Cette logique expliquerait des pratiques extrêmement diverses, telles que les
rites sacrificiels ( Abraham sacrifiant un bélier pour épargner son fils,
ou les assertions du grand prêtre CAÏPHE dans la passion du Christ
"Mieux vaut qu'un seul homme meure pour le peuple" Evangile selon St Jean
18,14 ), ou la prohibition de l'inceste
( cf. C.
LEVI-STRAUSS : cours de seconde ). Dans ce dernier cas, pour extirper
la violence née du désir de possession des femmes, de l'intérieur du cercle
familial, on détourne vers l'extérieur les stratégies de conquête. Ce qui aboutit
à la consécration de la logique de l'échange : un groupe donne un homme,
l'autre une femme. Ce type d'unions matrimoniales étaient dans les sociétés
traditionnelles, l'occasion de circulation de richesses matérielles et symboliques
( volonté sous-jacente de création de réseaux d'influence avec en contrepoids,
l'ambiguïté de la réciprocité, dans l'échange et le don cf. M. MAUSS
).
Par extension, dans la société marchande, l'échange
d'objets permet de dévier le désir mimétique de l'individu en tant que tel,
vers la possession desdits objets, grâce à une monnaie qui polarise toute violence.
Pour M. AGLIETTA et A. ORLEAN, dans La
violence de la monnaie, la généralisation des rapports monétaires
dans le cadre du système capitaliste serait emprunt de cette même dynamique.
La monnaie serait donc in fine, première : elle
fonde l'économie marchande ( les échanges de troc ne seraient donc pas préalables
aux échanges monétaires ). Elle est aussi plus généralement, la base du social,
dans la mesure où elle est ce bien, qui incarne, une violence polarisée exclue,
mais aussi cet équivalent général, qui permettra de représenter institutionnellement
le social ( mesure de la valeur comme nombre ).
La monnaie comme convention
La monnaie apparaît en définitive, comme une convention,
dans la mesure où elle constitue un accord de fait pour l’ensemble des individus,
qui se révèle, à l’usage, d’une grande commodité pratique, mais dont il est
impossible d’expliquer de façon expérimentale ( donc scientifique ), l’essence
( H. POINCARE ). Elle est un signe qui est l'émanation du social
: "la valeur de la monnaie n'est autre chose que ce que la société décide
d'y voir" ( J-B. RUFFINI ).
Séquence de réflexion approfondie
Utilisation du conte d’H.C ANDERSEN " Les habits neufs de l’Empereur "
Ce texte permet d'introduire la dimension virtuelle de la monnaie : elle est une croyance et peu importe si au fond, cette croyance est fondée ; mais un problème se pose quand un quidam écouté, met en doute la convention ( parallèle avec le "noise trader" sur les marchés financiers ).
On peut ici faire référence au théorème de THOMAS et au concept de "prophétie auto-réalisatrice" ou "prédiction créatrice" ( the Self-Fulfilling Prophecy ) de R-K MERTON ( cf. Robert King MERTON dans un article de 1936 "Les conséquences non anticipées des actions sociales intentionnelles" ou dans son livre Eléments de méthode sociologique Plon 1953 ).
Selon W. I THOMAS ( doyen des sociologues américains ) : "
Quand les
hommes considèrent certaines situations comme réelles, elles sont réelles
dans leurs conséquences"
"...les définitions collectives d'une situation ( prophéties et prévisions
) font partie intégrante de la situation et affectent ses développements ultérieurs.
Ce fait est particulier à l'homme et ne se retrouve pas ailleurs dans la
nature. Les prévisions sur le retour de la comète de Halley n'influent pas sur
son orbite. Mais la rumeur de l'insolvabilité de la banque de Millingville eut
une conséquence directe sur son sort. Prophétiser son effondrement suffisait
à le provoquer".
Robert King MERTON
Eléments de méthode sociologique Plon 1953
pp. 172-173
Pour pousser la réflexion un peu plus loin sur la détermination du réel (
face au virtuel ) ou sur la place du sujet face à l'objet, et ce faisant,
"oser" un
petit peu d'épistémologie, on peut faire référence à la mécanique
quantique et à l'interprétation de Copenhague en particulier, qui
nous décrit la réalité comme une interaction entre "observant" et
"observé".
Sur le sujet, consulter l'ouvrage fort intéressant de W. HEISENBERG (
1901-1976 prix Nobel de Physique 1932 ) Physique et philosophie
Albin Michel 1971.
"Tous les concepts et mots formés par la passé par
interaction entre le monde et nous-mêmes, ne sont pas vraiment définis quant
à leur signification ; c'est à dire que nous ne savons pas exactement jusqu'à
quel point ils nous aideront à découvrir notre explication du
monde".
W. HEISENBERG
Section 2 : Le système bancaire
I. La masse monétaire et ses contreparties
A. La masse monétaire
Elle se décompose en divers agrégats regroupant la
quasi-totalité des placements. Bien que floue, la limite entre monnaie et épargne
est maintenue : est monnaie ce qui est liquidable rapidement sans incertitude,
est épargne le reste.
Au 31 Août 1997 en France, il circulait 5390,7 milliards de francs d’actifs liquides ou
semi-liquides ( soit 821,81 milliards d'€uros ). Ces agrégats sont surveillés en permanence par la Banque
Centrale ( actuellement la Banque Centrale Européenne et précédemment la
Banque de France ).
En raison du passage à l'€uro ( 1 € = 6,55957 FF ), la Banque Centrale Européenne ( BCE ) a défini des agrégats harmonisés pour la zone €uro ( Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal ) qui ne diffèrent pas fondamentalement des précédents comme le montre le tableau ci-dessous.
Du + ou - liquide
Anciens agrégats pour la France |
Nouveaux agrégats pour la zone €uro |
M1 : disponibilité monétaire ou liquidité avec lesquelles on peut payer
(monnaies divisionnaires, papier, scripturale ). |
M1 : pièces et billets en circulation, dépôts à vue |
M2 : M1 + l’épargne quasi-liquide ( comptes sur livrets : livrets A, comptes épargne, Codevi... ) : épargne liquidable instantanément à sa valeur nominale. | M2 : M1 + dépôts à terme d'une durée égale ou inférieure à 2 ans + dépôts remboursables avec un préavis inférieur ou égal à 3 mois ( ex. en France : comptes à terme, livrets A de Caisses d'Epargne, comptes d'épargne logement... ) |
M3 : M2 + Les avoirs monétaires facilement négociables ( devises, comptes
à terme... ) : c’est l’épargne liquidable rapidement. |
M3 : M2 + pensions
+ titres de créance d'une durée supérieure ou égale à 2 ans + titres
d'OPCVM monétaires et instruments du marché monétaire ( ex. en France
: les obligations, titres de SICAV monétaires...) |
M4 : M3 + certains avoirs monétaires ( Bons du Trésor, billets de Trésorerie ) : liquidation assez rapide des placements mais risque de perte en capital. |
Les statistiques qui suivent sont tirées pour
l'essentiel :
- des bulletins mensuels de la BCE
- des publications de l'INSEE ( TEF, comptes nationaux ).
- du site intéressant de J-F GOUX (
Professeur d'économie à
l'université de Lyon II ) http://sceco-nte.univ-lyon2.fr/jfgoux/
Les agrégats monétaires...
...harmonisés de la zone
€uro
Encours en milliards d'€uros, en fin de période
( 1 € = 6,55957 FF )
Agrégats |
1991 |
1998 |
1999 |
2000 |
M1 |
1155,1 | 1776,9 | 1964,0 | 2076,1 |
M2 |
2795,9 | 3905,8 | 4133,2 | 4286,8 |
M3 |
3187,1 | 4455,6 | 4791,5 | 5078,3 |
Source : BCE, bulletin mensuel
...pour la France
( Encours en milliards d'€uros
)
Agrégats |
1999 |
M1 |
350,3 |
M2 |
663,2 |
M3 |
947,1 |
Source : TEF 2000-2001 INSEE
Quelques éléments de référence
:
Les PIB de la France et de la zone €uro
en milliards d'€uros
( 1 € = 6,55957 FF )
1998 | 1999 | 2000 | 2001 | |
PIB de la zone €uro | 5884,1 | 6142,3 | 6432,8 | --- |
PIB de la France ( en valeur ) | 1305,9 | 1 355,1 | 1 416,9 | 1 463,7 |
PIB de la France ( en volume ) base 1995 | 1259,1 | 1299,5 | 1348,7 | 1373,4 |
Source :
INSEE, Comptes Nationaux
B. Les contreparties de la masse monétaire
Par contrepartie de la masse monétaire, on entend les
facteurs qui en sont à l’origine. On n'y trouve plus les stocks d’or de la Banque
de France, mais plutôt les crédits aux divers acteurs économiques ( créances
sur les acteurs ).
"Battre monnaie" a longtemps été un pouvoir régalien, ou un pouvoir de
Prince. Ce principe perdure dans sa substance politique. D'un point de vue
strictement économique, une institution peut émettre une monnaie parce qu’elle
est fiable et reconnue comme telle, c’est à dire parce que les autres, en qui
tout le monde a confiance, ont des dettes envers elle ; c’est le coeur de la
notion de contrepartie.
Certains auteurs mettent en avant l'idée que bientôt
les grandes entreprises telles Microsoft ?? ou autres, pourront émettre leur
propre monnaie ( thèse de J. ATTALI Dictionnaire du 21ème siècle
). Cf. "free banking" de F.
VON HAYEK.
En somme, on bascule dans le domaine du subjectif : on est apte à produire une
monnaie parce que les autres nous font confiance, et parce qu’on leur fait confiance
: ceci explique l'interdépendance des agents, et le risque systémique
( M. AGLIETTA ) : Krach en Asie -> krach en Amérique Latine -> krach
en Europe ???
L'agrégat M3 et ses
principales contreparties pour la zone €uro
( en milliards d'€uros )
Monnaie |
Contreparties |
Billets et monnaies :
347,5 Dépôts à vue : 1728,6 Placements à vue ou à C.T. : 2210,7 Autres placements à terme et titres de créances négociables : 791,4
|
Créances sur l'économie
:
8802,9
dont : à déduire : |
en décembre 2000, source : Bulletin mensuel de la BCE ( juin 2001 ) Cf. site de J-F. GOUX
II . La spécificité bancaire dans l’intermédiation
financière
Le système bancaire et financier, au sens large, n’est pas un tout
monolithique : il est fondamentalement hétérogène puisque s’y mêlent des institutions
financières et agents financiers divers. La loi bancaire de 1984 et la loi de
modernisation des activités financières de 1996 en délimitent les contours.
On peut ainsi y déceler quatre grands types d'institutions :
1. Les établissements de crédits soumis à la loi bancaire de 1984 ( communauté
bancaire ), parmi lesquels il est nécessaire de distinguer, d’un côté, les
banques ( au sens strict, i.e adhérentes à l'AFB
Association
Française des Banques, mais aussi les banques mutualistes et coopératives y compris les
caisses d'Epargne et de prévoyance ), de l’autre, les sociétés financières (
ex :
Cetelem ) et institutions financières spécialisées ( ex : Crédit foncier
de France ).
2. Les entreprises d'Investissement ( maison de titres, sociétés de gestion de portefeuille...)
3. Les OPCVM ( organismes de placement en valeurs mobilières ) : institutions financières spécialisées dans la gestion collective de l'épargne ( ex : SICAV Société d'Investissement à Capital Variable et FCP Fonds Commun de Placement ).
4. Les autres institutions financières : organismes et agents financiers hors loi bancaire ( Service financier de la Poste, Caisse des dépôts et consignations...) et compagnies d'assurance.
Dans cet ensemble disparate , les banques ont les prérogatives les plus
étendues puisqu'elles peuvent contrairement aux autres institutions
véritablement "créer"
de la monnaie ( en plus de collecter l'épargne en contrepartie de titres ou
non ).
On peut ici noter que la Banque Centrale mais aussi le Trésor Public ont eux aussi le pouvoir de création
monétaire ( quoique plus restreint de facto ).
La Banque Centrale Européenne ( voir
infra ) par souci d'harmonisation des statistiques monétaires au sein de la
zone €uro retient, quant à elle, 3 grandes catégories d'établissements (
regroupés sous le terme d'IFM Institutions Financières
Monétaires ) :
- les Banques Centrales
- les établissements de crédit résidents i.e les "entreprises dont l'activité consiste à
recevoir du public des dépôts ou d'autres fonds remboursables et à consentir
des crédits" ;
- l'ensemble des autres institutions financières résidentes dont l'activité
consiste à recevoir des dépôts à vue et assimilés, à accorder des crédits
ou à effectuer des placements en titres.
A. Intermédiation financière
: cas général
Schéma de "transformation"
L’intermédiation financière concerne l’ensemble des
institutions financières. Cette activité consiste à recevoir des dépôts d’agents
à capacité de financement ( ressources supérieures aux besoins ) et à accorder
des prêts à des agents à besoin de financement ( ressources inférieures
aux besoins ), tout ceci sous les contraintes de confiance, liquidité, et solvabilité.
La banque transforme donc les risques ( taux d’intérêt ) et les échéances
( les termes ) et rend compatible des requêtes qui ne l’étaient pas a priori.
L’acte d’intermédiation est bénéficiaire, si la différence entre les intérêts
reçus des emprunteurs et les intérêts payés aux prêteurs, est supérieure aux
frais de gestion.
Détermination des agents à besoin et capacité de financement dans l'économie
Zinzins : investisseurs institutionnels : +
assurances : +
Mutuelles : +
Sicav : +
Caisses de retraite : +
Etat : -
Banque : + -
Ménages : +
Entreprises : - ( en principe )
On peut schématiser l’intermédiation grâce au bilan d’une banque :
- le passif est constitué par les dépôts des clients, et donc par ce
que la banque doit au client
- l’actif, lui comprend les réserves en monnaie centrale ( billets )
et les créances détenues sur les personnes à qui la banque a ouvert un crédit.
La monnaie bancaire est constituée par les dettes exigibles à vue de la banque,
et figure donc au passif de son bilan ; elle constitue une ressource ( passif
) équilibrée par un emploi ( actif ).
Ex : si on dépose 100 €uros sur un compte courant dans une banque, la banque a
cette somme à son actif ( billets ) mais aussi à son passif, puisqu'elle doit
nous rembourser ( dette ), donc la monnaie est un " actif passif ".
Exemple : cas simplifié
je pose 500 €uros dans une institution financière quelconque.
Vous
actif : billets 500-500 = 0 compte courant 500
Banque
actif : billets 500 passif : compte courant 500
Dans l’intermédiation financière on est face à une simple " circulation bancaire ":
l’argent, une fois prêté, n’est plus disponible. La relation est à somme
nulle.
Prêteur -500 €uros
Intermédiaire financier 0
Emprunteur + 500 €uros
B. La singularité bancaire : l'opération monétaire
1. La séquence
néoclassique ( NC ) : la "duplication monétaire"
* Des ressources vers les emplois ( passif vers actif )
Exemple : une personne dépose 800 €uros en banque et la banque reprête cette
somme à un emprunteur.
cas simplifié :
prêteur : - 800
banque : + 800
emprunteur : + 800
somme = - 800 + 800 + 800 = + 800
Jeu à somme
positive
La singularité bancaire tient à la nature monétaire
de la dette bancaire. En portant 800 €uros à la banque, on échange des billets
( créances sur la Banque Centrale ) contre de la monnaie bancaire ( créance
sur la banque de 2nd rang ). Dans l'exemple, la masse de monnaie en circulation
a augmenté du montant du crédit accordé soit 800 €uros. L’intermédiation bancaire,
dans la théorie NC, est donc un jeu d’écritures à somme positive, il y a duplication
de la monnaie.
Les enchaînements de causalité sont les suivants : " les dépôts font les
crédits " (" deposits make loans ") et l’épargne préalable permet
l’investissement. La véritable dimension de la duplication doit toutefois être
précisée, à travers le mécanisme du multiplicateur de crédit.
* le multiplicateur de crédit
C’est un mécanisme d’amplification de la création monétaire. Tout dépôt dans une banque va impliquer une succession de crédits ( puis de re-dépôts ) dans le reste du système bancaire ( de plus, comme il a été dit précédemment, les dépôts sont en monnaie banque centrale appelée " high powered money " et les crédits sont accordés en monnaie scripturale de banques de second rang ).
Ex : cas ultra-simplifié
dépôt initial 500 €uros, coefficient de billets 10% ( lié à diverses fuites )
somme des crédits accordés = 500 + 450 + 405 +... =500*( 1 + 0,9 + 0,9²+...+
0,9n ) =500*((1/1-0,9) (1/1-x ))
suite géométrique de raison 0.9 =500 * 10 = 5000
On part d’un dépôt initial de 500 €uros et on aboutit à une augmentation de la
monnaie bancaire de 5000 €uros.
Selon la formule générique :
delta M = k
delta H
|
k = 1/b
delta M = variation de la monnaie bancaire
k = coefficient multiplicateur
delta H = variation du dépôt initial en monnaie centrale ( "high powered
money" )
b = coefficient de billets
ex : quelle est la quantité de monnaie bancaire créée dans les conditions suivantes
? delta M ????
- dépôt initial 800 €uros coefficient de billets de 30%
- dépôt initial 10.000 €uros coefficient de billets de 20%
- dépôt initial 30.000 €uros coefficients de billets de 5%
* Les limites de la création monétaire
Le pouvoir de création monétaire est limité. A n’importe
quel moment, le détenteur de monnaie scripturale peut demander à être remboursé
en monnaie centrale ( billets ). Si la banque crée trop de monnaie, elle a des
problèmes pour en assurer la convertibilité . Les risques de fuite auxquels
elle doit faire face sont de deux ordres :
- les fuites en billets liées aux habitudes des usagers ( achat d'une
baguette de pain, du journal...).
- les fuites en réserves : la Banque Centrale impose aux banques de 2°
rang ( banques commerciales) des réserves obligatoires,
c’est à dire des comptes non rémunérés en monnaie centrale à la banque centrale. Toute
banque se doit donc de conserver une étroite proportion entre sa réserve de
monnaie centrale et sa création monétaire afin d’éviter tout risque d’illiquidité
et donc d’assumer dans la mesure du possible un phénomène de " défiance "
ou de " run ". Ce critère de solvabilité a été renforcé par la
réglementation COOKE adoptée le 11 juillet 1988 ( qui redéfinit une norme
minimale de capitaux de base ou de fonds propres ( 8% des actifs pondérés en
fonction du risque)).
travail sur la notion de "fuite" et de "compensation interbancaire"
En définitive, les monétaristes ( logique dichotomiste
équivalente aux NC ) vont émettre la thèse que dans l'économie, la création
de monnaie par les banques dépend en premier ressort, de la base monétaire
( monnaie banque centrale y compris les pièces ) émise par la Banque Centrale
( l'offre de monnaie est donc exogène ).
2. La séquence
keynésienne : la " création " monétaire
Selon cette optique, la banque crée ex nihilo
la monnaie qu’elle prête ; dans ce cas, le mouvement se fait non pas des ressources
vers les emplois, mais, des emplois vers les ressources, selon l’adage " les
crédits font les dépôts ". Il n’y a pas duplication mais véritablement,
"création" .
Selon KEYNES,
c’est l’investissement initial, qui va créer une épargne qui lui est égale.
* Le diviseur de crédit
En France, les banques bénéficiaient d’un refinancement automatique de la Banque Centrale et n’avaient donc pas à se préoccuper de leur position de liquidité pour octroyer des crédits. Au fur et à mesure que les fuites se produisaient, elles obtenaient de la liquidité de la Banque Centrale ( en monnaie centrale ). Le schéma s’inverse, on parle de " diviseur de crédit ".
delta
H = ( 1 / k ) delta M
|
delta H = b delta M
Ex : une banque a accordé pour 600.000 €uros de crédits, le coefficient de billet est de 5%. delta H ???
Dans ce mode d'analyse, ce sont les agents non financiers qui de par leurs demandes de crédits, déterminent l'offre de crédit des banques, qui elles-mêmes se retourneront vers la Banque centrale pour se refinancer. En somme, l'offre de monnaie est déterminée par les besoins de l'activité économique ; elle est endogène.
III. Des acteurs primordiaux du système bancaire : SEBC, Banque de France et Trésor Public
A. Le SEBC et la Banque de France : la hiérarchie du système bancaire
Le système bancaire est fondamentalement hiérarchisé
à l'échelle européenne désormais, dans un édifice à étages ou quelques
acteurs clés chapeautent l'ensemble.
1.
Le SEBC
Conséquence du Traité de Maastricht ( signé le 7 Février
1992 ), la Banque centrale européenne (BCE)
a été créée le 1er juin 1998 ( siège : Francfort ). Celle-ci
( en fonction véritable depuis le 1er janvier 1999 ) se voit chargée de conduire la politique monétaire
unique en €uro ( €uro comme seule monnaie de 12
pays de l'Union Européenne depuis le 1er janvier 2002 ). Elle forme avec les autres banques centrales nationales
( BCN ) des États membres de l'Union Européenne, une structure multipolaire,
fédérale et décentralisée ( cf. principe de subsidiarité ), le
système européen
de banques centrales (SEBC).
* Les grands principes de fonctionnement du SEBC : le cadre
est plutôt monétariste.
NB : Les informations qui suivent sont tirées pour
l'essentiel du site de la Banque
de France.
- Une politique monétaire unique ( avec exécution décentralisée ) dont
l'objectif final est la stabilité des prix
( article 3a du Traité de Maastricht ).
Exit
donc les formules keynésiennes " Les politiques fondées sur un
arbitrage entre l'inflation et le chômage ont échoué, conduisant à plus
d'inflation et plus de chômage". Cf. site Banque de
France.
Elle consiste en une politique de taux d'intérêt pour l'essentiel.
La valeur de référence porte sur l'agrégat monétaire large M3.
- Une indépendance ( dans les textes du moins ) vis-à-vis des autorités politiques. La BCE élabore seule la politique monétaire de l'UE. Son indépendance est conçue comme gage de "crédibilité".
"Dans l'exercice des missions qu'elle
accomplit à raison de sa participation au Système européen de banques
centrales, la Banque de France, en la personne du Gouverneur, de ses
sous-gouverneurs ou d'un autre membre du Conseil de la politique monétaire,
ne peut ni solliciter ni accepter d'instructions du Gouvernement ou de toute
personne".
Cf. site Banque de
France.
- Une conduite des opérations de change par la détention et la gestion des réserves de change des Etats membres ( mais les autorités politiques en gardent la responsabilité cf. Conseil des Ministres ).
- Un contrôle prudentiel des établissements de crédit, en assurant la stabilité du système financier, en gérant les moyens de paiement.
* L'organisation du SEBC
Au sein du SEBC les décisions
sont prises par "le centre" ( le Conseil des gouverneurs de la BCE)
mais les BCN participent néanmoins dans une certaine mesure à la préparation
et à la mise en œuvre des décisions.
Les organes de la BCE sont le Conseil des gouverneurs, le Directoire et le Conseil général :
- Le Directoire : dirigé par le président et le vice-président de la BCE, il comprend quatre autres membres, nommés par consensus par les gouvernements des Etats membres. Leur mandat est en principe de 8 ans ; il est non renouvelable. Le Directoire est l'exécutif du SEBC : il met en œuvre la politique monétaire décidée par le Conseil des gouverneurs.
- Le Conseil des gouverneurs est composé
des membres du Directoire et des gouverneurs des banques
centrales nationales ( BCN ) de la zone €uro. Il définit la politique monétaire,
c'est-à-dire notamment les objectifs monétaires intermédiaires, et les taux directeurs.
Les modalités du vote sont "un membre, une voix" ; celle du président
est prépondérante en cas de partage des voix. Les décisions sont prises à la
majorité simple.
- Le Conseil général est l'organe qui regroupe, au sein de la BCE, les gouverneurs de l'ensemble des pays de la Communauté, qu'ils participent ou non à l'Union monétaire ( avec la présence du président et du vice président du Directoire ).
Pour en savoir plus : cf. Site de la banque centrale européenne ( BCE )
2. La Banque de France
La Banque de France n'est plus qu'un maillon du dispositif européen.
Bref historique : créée le 18 janvier 1800 par décret par BONAPARTE, elle tombe sous la coupe du gouvernement par la loi du 24 juillet 1936 ( remplacement des "régents" par des conseillers nommés par le gouvernement ), puis est nationalisée en 1945 ( autrefois elle appartenait aux 200 familles). Le 4 Août 1993, elle obtient un statut d’indépendance équivalent à celui de la BUBA ( BundesBank ).
Elle remplissait jusqu'à la création de la BCE plusieurs fonctions :
- Emission de la monnaie légale : elle avait le monopole d’émission de la
monnaie nationale depuis 1848, on parlait d’Institut d’émission.
- La gestion des réserves publiques de change
- La fonction de banques des banques, elle jouait le rôle de " prêteur
en dernier ressort ". Elle chapeautait le système bancaire, en imposant aux
banques de 2nd rang des réserves obligatoires : elle était la garante de la liquidité
et de la solvabilité du système. Elle était celle à qui on faisait confiance quand
rien ne n'allait plus ( " Banque Mère " ).
Désormais l'essentiel de ses prérogatives est transféré au niveau de la BCE.
C’est la personnalisation financière de l’Etat :
- il est le caissier de l’Etat, et perçoit à ce titre les impôts, gère la dette
publique...
- il emprunte aussi au nom de l’Etat en émettant des Bons du trésor.
- il est enfin le banquier de l’Etat : il prête à l’Etat grâce aux comptes de
ses correspondants ( collectivités territoriales ) et peut créer de la monnaie
à travers les CCP. C'est donc un intermédiaire financier exerçant une activité
bancaire.
Section 3 : Le financement de l’économie
Le financement de l'économie concerne les opérations par
lesquelles les agents à besoin de financement obtiennent des ressources.
I. Les enjeux de la monnaie
A. Les controverses doctrinales récurrentes
1. Le débat initial et les théories sous-jacentes
Dans la première moitié du 19ème siècle, en Grande-Bretagne,
un débat fameux
eut lieu entre la " banking
school " et la " currency
school ".
Pour les tenants du " banking
principle "( principe de banque ), la monnaie est un moyen de paiement
et donc, avant tout, un instrument de crédit, suscité par les besoins de l'économie
( on parlera bien plus tard, de "monnaie endogène" ). La création monétaire
est un viatique, qui se doit d'être souple afin de s’adapter auxdits besoins,
et par conséquent, d'assurer d’autres objectifs dans l’économie comme la croissance...
Aussi, la monnaie suit comme "l'intendance", les besoins de l'homme d'affaires
( Cf. H. GUITTON ). Selon cette école, le crédit bancaire ne peut jamais
être à l'origine d'une éventuelle inflation ( car il y a eu une stricte proportion
entre crédits bancaires et besoins de l'économie). Seuls les abus spéculatifs
doivent être contrôlés ( TOOKE, FULLARTON... ).
A contrario, les tenants du " currency
principle " ( principe de circulation : OVERSTONE, RICARDO
), proclament que toute banque doit maintenir en vertu des critères de convertibilité,
une stricte égalité entre la quantité de billets mise en circulation et son
fondement véritable : la quantité d’or. Dans cette perspective, la valeur
de la monnaie lui est conférée par le recours à un argument externe ; plus tard
M.
FRIEDMAN mettra en avant la notion de règle "constitutionnelle" d'émission
monétaire : on parlera alors de "monnaie exogène" avec comme idée récurrente
la nécessité de la norme.
Cette théorie est basée sur l’idée que la monnaie n’est
qu'un " voile ", que la richesse véritable se trouve dans le travail et dans
les biens, c'est à dire dans le secteur réel de l'économie ( loi de SAY
" les produits s'échangent contre les produits"). L'histoire va donner
raison aux idées ricardiennes ( 1844 : Bank Charter Act ). Pour
RICARDO
et l'école de pensée qui assurera son héritage, le seul objectif de la monnaie
est d'assurer au mieux le jeu des automatismes économiques en restant neutre
et stable.
De nos jours, ce clivage entre partisans d'une monnaie
"neutre" et d'une monnaie "active", se retrouve. Les classiques
et néo-classiques pensent que les effets de la monnaie sur la production sont
nuls : on reste dans une logique de "quasi-troc". Il existe une dichotomie
entre le réel et le monétaire (" économie réelle de production "),
qui plus qu'une juxtaposition est un "clivage préférentiel" ( réel > monétaire
) ( cf. B. SCHMITT ). L'accroissement de la masse monétaire, crée une
"illusion monétaire" qui ne peut modifier à long terme les données réelles de
l'économie. Cette approche s'appuiera sur la quantitativisme mis en équation
par Irving
FISHER au 20ème siècle, et sur le monétarisme de M.
FRIEDMAN
. Cependant, il est intéressant de noter, que ce courant passe d'une vision
en terme de neutralité de la monnaie, à une vision en terme de neutralisation
de la monnaie ( FRIEDMAN
défendant la thèse que la monnaie est active, mais à court terme ), ce qui constituera
la norme des politiques monétaires dans le début des années 80 dans le monde
occidental. Avec la Nouvelle Macroéconomie Classique ( NMC ), et l'hypothèse
force des Anticipations rationnelles (
R. LUCAS ), la monnaie n'est même plus active à court terme ( hyperneutralité
sous
certaines réserves : effet de surprise ), néanmoins les autorités doivent maintenir
une politique de la règle ( crédibilité, réputation, cohérence temporelle...)
pour corseter la monnaie, a priori. L'idée de norme est poussée encore
plus avant, à l'heure actuelle, avec la notion de "norme active".
A contrario, J-
M. KEYNES, met en avant l'idée, que la monnaie est active ( vision
intégratrice réel et monétaire ), qu'elle influence le niveau général de l'activité
économique ( Investissement, consommation, production… ) au sein d'une "économie
monétaire de production". La monnaie est en fait première, car elle préfinance
la production, et peut même être demandée pour elle-même ( préférence pour
la liquidité des agents ). Une politique monétaire discrétionnaire peut
s'avérer être dans cette optique un levier d'intervention adéquat, afin de relancer
l'activité économique en rétablissant la confiance des entrepreneurs.
B. Faits et méfaits en économie : une histoire de théories
En fonction des conceptions de la monnaie, définies
au préalable, les économistes vont désigner les réactifs et les produits, de
la monnaie dans l'économie. J-P DUPUY professeur à l'Ecole polytechnique,
définit ces imbrications fort judicieusement :
"L'argent est un objet bien singulier en vérité. Quand tout le monde veut
le posséder ( le " thésauriser " ), il perd sa valeur, il s'évanouit en fumée
( c'est la crise de déflation keynésienne ); quand tout le monde veut s'en débarrasser,
le refiler aux autres, il perd sa valeur aussi bien ( c'est la crise inflationniste
). Pour que l'argent garde sa valeur, il faut donc qu'il circule constamment,
régulièrement, sans panique, sans précipitation certains acceptant de le détenir
momentanément en sachant qu'ils pourront s'en débarrasser le moment venu. "
J-P DUPUY Introduction aux sciences sociales Ellipses 1992
Ainsi, tandis que les keynésiens mettent l'accent sur le danger de la déflation, les monétaristes pointent du doigt l'inflation comme mal absolu.
L'inflation est selon G. OLIVE
( Economie et statistique n°77 ) "une hausse
du niveau général des prix, auto-entretenue, et fondée sur des mécanismes
macroéconomiques". Elle est aussi inévitablement une déformation de la structure
des prix relatifs.
L'inflation calculée par l'INSEE, pour la France, est la moyenne pondérée de
l'indice des prix à la consommation, de 295 postes, représentant plus des 9/10
des biens et services consommés par les ménages.
La déflation est la baisse du niveau général des prix ( grandeurs nominales
puis souvent réelles ). Elle est le signe ostensible d'une crise généralisée
( exemple : crise de 1929 ).
La désinflation est la baisse du taux d'inflation. Les prix continuent
d'augmenter, mais moins vite ( il n'y a donc pas de baisse des grandeurs réelles,
des quantités achetées ). La France a connu dans les années 80, une période
de désinflation ( baptisée " désinflation compétitive ") : l'inflation
passant de 14% en 1981 à 2,1% en 1986.
2. les analyses
de l'inflation
Les quantitativistes depuis J.
BODIN ( 16ème siècle ), estiment qu'il existe un lien direct entre la
masse monétaire et le niveau général des prix ; ce qu'Irving
FISHER va mettre en équation :
M*V= P*T |
masse monétaire * vitesse de circulation de la monnaie = niveau général des
prix * volume des transactions
C'est la " formule quantitative de la monnaie ".
L'inflation, pour cette école, est toujours et partout un phénomène purement
monétaire qui vient d'un trop plein de monnaie mis en circulation ( offre de
monnaie trop importante de la Banque Centrale).
Milton
FRIEDMAN, prix Nobel d'économie en 1976, principal chantre de la théorie
monétariste, a donné un souffle nouveau à cette thèse qui a eu un grand retentissement
dans le monde occidental : États-Unis, Europe. Pour ce dernier, l'inflation
est l'ennemi " numéro 1 "en économie, qu'il convient de combattre par un contrôle
draconien de l'augmentation de la masse monétaire. La neutralisation de la monnaie,
pour qu’elle ne fausse pas les mécanismes autorégulateurs du Marché à court
terme ( économie réelle de production ), est devenue paradoxalement une fin
en soi.
Pour d'autres écoles de pensée, les causes de l'inflation
peuvent être recherchées dans le secteur réel de l'économie, cependant elle
n'est pas forcément à proscrire aussi fermement ( Cf. courbe de Phillips pour
les keynésiens de la synthèse ).
- L'inflation par la demande est issue du paradigme keynésien. Lorsque
la demande est supérieure à l'offre de biens et que cette dernière ne peut s'adapter
( on parle d'une " élasticité faible "), cela crée de l’inflation.
- L'inflation par les coûts : son origine se situe au cœur du processus
productif : l’augmentation des salaires, des prix des consommations intermédiaires
et la volonté de l'entreprise de conserver sa marge de profit entraînent une
hausse des prix.
- L’inflation par les structures : cette explication met en avant l'idée
que l’inflation provient du mode de fonctionnement inhérent au capitalisme :
marché oligopolistique, prix rigides à la baisse... L'inflation peut être aussi
le résultat de facteurs sociaux ( négociations salariales, intervention de l'Etat...).
Actuellement la théorie libérale, monétariste puis par
la suite NMC, domine : la lutte contre l'inflation devient la priorité de nombreux
pays de l’OCDE. Cette politique favorise les rentiers au détriment de l'économie
réelle et des personnes qui s’endettent, d'où sa remise en cause par certains
économistes, tel Alain COTTA.
II. Le financement des activités
Lors d’un financement externe c’est à dire d’un
recours à l’extérieur ( le contraire étant le financement interne ou autofinancement
au sens large ), l’agent à besoin de financement se trouve en face de deux choix :
- la première occurrence est le financement intermédié où la banque,
ou tout autre intermédiaire financier s’intercale, entre lui et l’offreur de
monnaie ; on parle ici de financement monétaire en cas de création de
monnaie.
- la deuxième est le financement direct où les agents se retrouvent sur
le Marché.
A. Le financement intermédié ( indirect ): la priorité Keynésienne
Pour KEYNES, la finalité de l’économie est le " plein emploi ", et la monnaie est un moyen d’intervention dans l’économie pour parvenir à ce résultat. Le moteur de la dynamique capitaliste, est dans cette optique, l’investissement ( et dans une moindre mesure la consommation ) et non l’épargne. En effet, pour cet auteur, l’épargne est improductive, et peut conduire, à travers les mécanismes boursiers, à la création d’une " économie de casino " : la solution serait donc d’" euthanasier le rentier ".
" Les spéculateurs peuvent être aussi inoffensifs que des bulles d’air dans un courant régulier d’entreprises. Mais la situation devient sérieuse lorsque l’entreprise n’est plus qu’une bulle d’air dans le tourbillon spéculatif. Lorsque dans un pays le développement du capital devient le sous-produit de l’activité d’un casino, il risque de s’accomplir en des conditions défectueuses ".
J.
M KEYNES La théorie générale de l'emploi de l'intérêt
et de la monnaie ( 1936 )
Payot 1996 livre 4 chap 12 p.
173
Pour les Keynésiens, l’épargne est un résidu dépendant
de l’importance du revenu. Selon la loi psychologique fondamentale, " les
hommes ont tendance à accroître leur consommation à mesure que leur revenu croît
mais non d’une quantité aussi grande que l’accroissement du revenu ". Quand
le revenu augmente, la propension à consommer baisse.
Revenu --> Consommation --> Taux d’intérêt --> thésaurisation ou épargne
Dans la tradition keynésienne, les banques occupent
une place prépondérante, puisque ce sont elles qui en accordant les crédits
vont permettre à l’activité économique de se développer. Empiriquement, on peut
évoquer cette vision à travers le vocable de J. HICKS, à savoir " l’économie
d’endettement " ( "overdraft economy" ). Cette tradition plaide aussi
en faveur d’un taux d’intérêt faible à long terme ( même si ce n'est pas l'élément
principal ), en vue de favoriser l’investissement des entreprises ( de capacité
en particulier ). La condition sine qua non du fonctionnement de l’économie
est, pour les keynésiens ( post-keynésiens en particulier ), la confiance en
l’avenir ( l’ennemi n°1 est l’Incertitude ).
B. Le financement direct, désintermédié : la priorité néoclassique ( NC )
Les NC, quant à eux, se font les chantres des marchés financiers, qui se rapprochent le plus des postulats des marchés parfaits : ils plaident donc, de fait, pour une économie dite "de marchés financiers " ou "auto economy". Sur ces marchés, règne en maître le " laisser faire, laisser passer " assurant un " optimum économique", grâce à un mécanisme autorégulateur.
1. Le rôle central de l’épargne
Pour les NC, l’Epargne ( S comme Savings ) est une renonciation à la consommation ( C ) immédiate et donc une consommation différée dans le temps ( en espérant une consommation future plus importante ). Cet arbitrage entre consommation présente et future est fonction du taux d’intérêt.
Revenu --> taux d’intérêt--> consommation ou épargne
Cf. arbitrage intertemporel (
I. FISHER )
Une illustration de cette vision "sacrificielle" de l'épargne nous est fournie par G. GILDER dans Richesse et pauvreté ( ouvrage de chevet du président R. REAGAN durant ses mandats ). L’Epargne peut être encouragée par les gouvernements sous forme d’exonération de taxes et d’abattements. Elle peut être aussi placée sur les marchés financiers et ainsi, être disponible pour les agents qui en ont besoin. Ex : promotion de la retraite par capitalisation.
2. Les marchés de capitaux : des marchés compartimentés
C’est le marché des capitaux courts ou moyens ( inférieurs
à 7 ans ). Il se divise en 2 :
- le marché interbancaire : il détermine le taux de l’argent à court
terme : c’est en fait le coût de l’argent pour le banquier et donc, a
priori,
le taux d’intérêt le plus bas ( taux de base bancaire ).
- le marché des titres courts : on y trouve aussi des titres négociables
de 10 jours à 7 ans. Il est ouvert à tous les agents économiques
remplissant certaines conditions ( exemple de restriction : durant les années
90, le moindre achat ou vente devait se monter à 1 million de francs
minimum soit
152 449 €uros environ ). Les OPCVM
( organisation de placement collectif en valeurs mobilières ) y ont accès.
Fin 1989, les billets de trésorerie ( émis par les entreprises ) se montent
à 129 milliards de francs ( soit 19,67 milliards d'€uros ).
Les certificats de dépôts émis par les banques se montent à 546 milliards
de francs ( soit 83,24 milliards d'€uros )..
Les Bons du Trésor négociables ( émis par le Trésor Public ) se montent
à 520 milliards de francs ( soit 79,27 milliards d'€uros ).
b.
Le marché financier
i. Les différents
types d'actifs
- Une action : est un titre émis par une société, représentant une fraction
de son capital social. Elle procure un revenu ( dividende en fonction des résultats
des sociétés ), et permet à l'actionnaire de participer aux décisions de l'entreprise
( conseil d'administration ). Son prix effectif varie en Bourse. Un rachat par
offre publique d'achat ( OPA ), est possible à partir du principe de l'actionnariat.
- Une obligation est une valeur rapportant un revenu ( intérêts ) et
un titre de créance à long terme sur l'agent qui l'a émise.
Ex : Entreprises, banques, Etat...
Ex : emprunt La POSTE - Novembre 2006
taux d’intérêt nominal : 9 %
obligation : 5000 €uros
durée : 9 ans amortissement à la fin, le 15 novembre 2015
premier coupon payable le 15 novembre 2007 ; soit 450 €uros
Par extension, on peut ici faire réference aux produits collectifs en valeurs mobilières : les OPCVM (
organismes de placement collectif en valeurs mobilières) collectent l'épargne
auprès du public afin de la placer sur les marchés financiers.
Ex : SICAV ( société d’investissement à capital variable ), dont la fonction
est d’attirer le petit épargnant. Une des plus grande SICAV du monde a été dans
le début des années 90, la SICAV " Magellan " qui représentait 900 milliards
de $.
ii. L'hétérogénéité
du marché financier
* Les différents marchés
Le marché financier est le lieu d’émission et d’échange de titres longs
( > 7ans ) appelés valeurs mobilières ( actions et obligations ). Ce marché
est compartimenté, il comprend :
- un marché primaire ou marché du neuf qui concerne les émissions nouvelles
de valeurs mobilières qui ont pour objet d’apporter du capital à l’émetteur.
C’est par le biais de ce marché que la bourse assure sa fonction de financement
direct de l’économie ( il favorise donc l’investissement véritable ). Toutefois,
ce marché ne concerne que 5 à 10 % du volume des échanges de titres selon R.
PASSET.
- un marché secondaire ou marché de l’occasion : sur ce marché se font
des transactions ( achats ventes ) de titres déjà émis. Ainsi, les détenteurs
d’actions et d’obligations ont la possibilité de les revendre à tout moment.
Sans ce marché secondaire qui assure la liquidité des titres, il ne pourrait
y avoir de marché primaire. A l’occasion d’une transaction sur le marché secondaire,
l’émetteur de l’action n’est pas concerné par cet échange, il ne collecte pas
de nouveaux capitaux puisque tout se passe entre épargnants : on est en présence
d'une logique de placement qui équivaut à de l'épargne pure et simple.
Les cotations des valeurs ont lieu sur divers segments du marché :
- la cote officielle : ce marché regroupe les actions et les obligations
des sociétés françaises et étrangères importantes . L’admission des sociétés
se fait à un certain nombre de conditions. Elle leur permet d’accéder au marché
au comptant et pour les plus grandes d’entre elles au marché à règlement mensuel.
- Le second marché créé en 1983 permet aux entreprises de taille moyenne
de réaliser des augmentations de capital.
- Le nouveau marché créé fin 1995, sur le modèle du NASDAQ américain,
est destiné aux sociétés à haut potentiel de développement en particulier dans
le domaine des nouvelles technologies.
Cf. Bourse de Paris
* Les opérations
Sur les marchés, le dénouement d'une transaction, achat et vente, peut avoir
lieu le jour même, ou à la fin du mois boursier ( opération à terme : marché
à règlement mensuel ).
Le principe des opérations à terme est le suivant : un acheteur croit
en une hausse du cours d'une action par exemple et pense acheter bon marché,
aujourd'hui, un titre qu’il revendra ultérieurement à un cours plus élevé. A
l'inverse, le vendeur quant à lui, croit en une baisse du cours et vend aujourd’hui
des titres qu’il ne possède pas afin de les racheter à un moindre prix.
En introduisant un décalage temporel, l'opération à terme permet la spéculation.
Il faut prendre ce terme sans connotation péjorative, a priori : "speculare"
veut dire prévoir ; et sans spéculateurs, "risk lovers", l'activité économique
ne pourrait fonctionner, car ce sont eux qui supportent le poids du risque et
permettent de prime abord, le bouclage financier du système ( toutefois celle-ci
peut-être déstabilisante à terme ).
- Sur les Marchés dérivés s'échangent des contrats se rapportant à des actifs susceptibles de varier amplement, qui concernent tant le marché financier que les devises ou le marché monétaire. Les marchés dérivés, se sont inspirés de la logique des marchés à terme de matières premières, où le contrat ( opération papier : engagement ferme de vendre ou acheter à une période donnée ) avait pour but originel, de protéger les agents des fluctuations du futur, incertain par définition.
Exemple : on est en janvier et le prix de la tonne de soja est à un cours idéal
pour l'acheteur que je suis ; cependant je n'aurai besoin effectivement de
ces tonnes de soja qu'en avril ( et je ne peux les stocker à présent ) : comment
faire ?
Je dois procéder à une opération papier qui compense, l'opération physique.
Janvier instant t0
|
Avril t1
|
|
prix p0 | achat au comptant au prix p1, de 10 tonnes de Soja | opération physique au comptant |
achat de contrats à terme au prix po | revente de contrats à terme au prix p1 | Opération papier contrat à terme |
coût : p0 | coût : p1 gain : p1 |
total : p1-p1-p0 = - p0 |
L’opération m’a coûté p0 : j’ai acheté 10 tonnes de soja pour avril au prix
de janvier : je me suis couvert contre le risque.
On appelle ce type d'opération un "arbitrage en couverture
d'effectif ". Dans ce répertoire, il existe aussi les "opérations à cheval".
Cependant, au fil du temps les opérations papier se sont libérées, de la contrainte
des opérations physiques. Ces types de marché font croître une spéculation
devenant un problème explicite lorsqu'elle sort de sa fonction initiale, et
en vient à modifier intrinsèquement les données financières et réelles de l'économie,
dans une perspective de gain à court terme ; elle n'apparaît plus aussi stabilisatrice
que le clamait M.
FRIEDMAN.
"Dans un système de changes fluctuants […] si un mouvement quelconque des taux de change semble provisoire, il sera dans l'intérêt des détenteurs privés de devises de l'amortir par la spéculation, et on peut compter sur eux pour le faire.[…] Par dessus-tout, les taux de change fluctuants nous permettraient […] d'assurer les différents volets de notre politique nationale sur des bases solides […] sans pour autant être obsédés par le problème de la balance des paiements"
Milton FRIEDMAN Inflation et systèmes monétaires Calmann-Lévy Paris 1968
Pour analyser de façon plus approfondie la thèse de FRIEDMAN sur la spéculation
:
FRIEDMAN. M "In Defense of Destabilizing Speculation"
in The Optimum
Quantity of Money and Others Essays, Aldine, 1969,
p.285-291.
En France, le MATIF ( Marché à Terme International de France ) créé en
1986, porte sur des contrats concernant le marché financier, le marché monétaire
voire le change, et le MONEP ( marché des options négociables de Paris
) propose quant à lui des options sur actions et indices boursiers.
Conclusion
Les années 80 d’obédience libérale ( contrairement
aux années d'après-guerre, plutôt "keynésiennes" ( courant de la synthèse
)), ont été celles des " 3 D "d’après H. BOURGUINAT :
- " déréglementation "
- " décloisonnement "
- " désintermédiation " .
Durant cette période, la déconnexion entre la sphère
financière et réelle n'a cessé de croître : l’argent ayant tendance à être placé
sur les marchés financiers, plutôt que dans le secteur productif ( industrie
), à telle enseigne que ce sont désormais les marchés financiers qui imposent
leurs politiques aux gouvernements ( notion de "prime de risque" ). De
plus, la Bourse est fragilisée par les anticipations irrationnelles des agents
( retour sur la notion de mimétisme ), qui font varier
les cours boursiers de manière incontrôlable et non justifiée ( en apparence
), et l'expansion de produits financiers douteux. La place qu'occupe la Bourse,
de nos jours fait penser à "l'économie de casino " que dénonçait KEYNES.
La solution mise en avant par de nombreux auteurs, apparaît être la " reréglementation "
à travers, en particulier, la taxation des mouvements de capitaux spéculatifs:
ex : la taxe TOBIN du nom du prix Nobel d'économie 1981.
III. Les politiques monétaires
La politique monétaire, comme son nom l'indique vise
à atteindre des objectifs économiques réels ( consommation, emploi, investissement…)
grâce à des moyens monétaires.
Afin d'atteindre un objectif final ( plein emploi, stabilité de la valeur
de la monnaie…), les autorités monétaires se fixent des objectifs intermédiaires
( croissance de M3 par exemple…). Le terme de "politique" est de nos
jours quelque peu vidé de sons sens originel, dans la mesure où par exemple
la BCE est "indépendante". Elle
n'est plus inféodée au contrôle démocratique des citoyens, mais reste asujettie
à des normes théoriques ( NMC en particulier ), et concrètes , imposées
par les marchés financiers.
Retour sur le SEBC.
* Les instruments de politique monétaire à disposition :
- La BC ( banque centrale ) peut réguler indirectement la masse monétaire en
jouant sur le taux de réescompte , sur les taux directeurs ( impact sur la demande
de crédits ), sur les réserves obligatoires . Elle peut enfin
jouer sur les liquidités ( impact sur l'offre de crédits ) et ainsi agir sur
le coût du refinancement, quand le marché monétaire est ouvert à de nombreux
intervenants ( "open market") en particulier.
- Il existe aussi des mesures réglementaires permettant de façon directe de
contrôler la masse monétaire comme l'encadrement du crédit supprimé en
1986 en France.
* Les objectifs et les moyens d'intervention ne sont, au demeurant, que les
pâles reflets et instruments de théories économiques sous-jacentes :
- Pour les keynésiens, la régulation de l'économie de Marché, passe par
des interventions discrétionnaires en matière monétaire en particulier : la
politique de la Banque centrale ( sous la direction du gouvernement ) doit donc
faire varier les taux d'intérêt via le réescompte, afin d'influencer
l'activité économique en vue du plein emploi ( objectif final ) : ceci a donné
les politiques d'arbitrage entre inflation et chômage dites de "stop and
go" ( avec "fine tuning" ), de l'après 2ème guerre mondiale à la
fin des années 70.
-Pour les monétaristes, la politique monétaire doit viser la neutralisation de la monnaie en édictant de règles strictes ( "règle d'or" ) en matière de croissance de la masse monétaire ( surveillance des agrégats et lutte contre l'inflation ), ceci afin de garantir à la monnaie sa stabilité et sa valeur, interne et externe ( ex : P. VOLCKER ( président de la FED ) aux E-U en 1979 ). Les instruments privilégiés furent dans un premier temps, les réserves obligatoires, puis de plus en plus "l'open market" . Car désormais , ce sont les partisans de la NMC qui ont le vent en poupe, et parviennent à imposer leur vision : indépendance des banques Centrales en vertu du principe de "cohérence temporelle", rôle principal du taux d'intérêt directeur...( il apparaît ici, plus que nécessaire de bien dissocier, l'analyse de FRIEDMAN et des partisans de la NMC qui sont aux antipodes sur le statut de la Banque centrale et sur les questions concernant l'offre de monnaie : à transformer en variable aléatoire pure ou non ?? ).
* Il est intéressant de noter le poids de plus en plus important pris par
les variables psychologiques face aux fondamentaux, dans les domaines monétaire et financier :
crédibilité, lisibilité... qui relèvent d'autant de conventions
sociales... La sensibilité, susceptibilité, voire paranoïa ( F. LORDON
) des marchés financiers en sont les preuves éclatantes.
Un bon gouverneur de Banque Centrale est une personne qui doit inspirer
"confiance" c'est à dire répondre de facto, à certains codes
culturels ( en jouant de "l'effet d'annonce" par exemple ) afin que les autres puissent projeter sur lui ce
qui les rassure intrinsèquement. On peut noter ici les différences de pointure, entre A.
GREENSPAN ( véritable "sorcier" ) et Wim DUISENBERG (
d'un "naturel" plutôt "gaffeur" ).
Conclusion
Le débat sur la réalité monétaire reste vivace, de nos jours encore, et, peut être résumé par l’intervention au 19ème siècle du député anglais GLADSTONE qui, lors d’un débat parlementaire sur les " Banks Acts " de Sir John PEEL, faisait remarquer que l'amour lui-même n'avait pas fait perdre la tête à plus de gens, que les ruminations sur l'essence de la monnaie.
* Livres
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* Articles et revues
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révolutionnaires de KEYNES en politique économique et le déclin du capitalisme
rentier" Economie appliquée 1989
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- ARROUS. J "KEYNES et les probabilités
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- Sciences humaines N°68 Janvier
1997
- "Anatomie de la crise financière" Manière de
voir N°42 nov-déc
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* Sites de référence
http://cepa.newschool.edu/ Un des "must" en matière d'HPE ( Histoire de la Pensée Economique ).
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/revues/pe/glossaire/glossab.shtml Site de la documentation française avec un glossaire fort utile pour définir les mots clés de l'économie ( en particulier ceux du programme ).
http://sceco-nte.univ-lyon2.fr/jfgoux/ Site intéressant de J-F GOUX ( Professeur d'Economie à l'Université de Lyon II ) avec des mises à jour concernant ses ouvrages.
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mise à jour 07/2002